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ALCALOIDES DERIVES DU TROPANE

GENERALITES

On trouve dans cette famille des alcaloïdes très importants tels que les alcaloïdes parasympatholytiques des
Solanaceae (Hyocyamine, atropine) et ceux anesthésiques locaux des Erythroxylaceae.

1. STRUCTURE

La tropane résulte de la fusion des noyaux N-méthylpyrrolidine et N-méthylpipéridine, avec l’atome d’azote
commun aux deux cycles. Le tropane est ici sous forme alpha ou alors tropanol bêta (ou pseudo-tropanol). Les
alcaloïdes sont en définitive des esters de ces alcools avec des acides organiques variés.

2. CLASSIFICATION

Elle tient compte de la nature de l’alcool tropanique.

1. Les esters du tropanol et dérivés

a/ Esters du tropanol
Retenons deux esters du tropanol et de l’acide tropique (acide hydroyméthyl-
phénylacétique)

- L’hyoscyamine : ester de l’acide 1-tropique (levogyre)


- L’atropine : ester de l’acide dl-tropique (racémique)

Plantes : Belladone, Daturas…

b/ Esters du scopanol (époxyde du tropanol)


Un exemple : la scopolamine dans laquelle le scopanol est estérifié par l’acide tropique.

Plantes : Datura inoxia, D. metel.

2. Esters du tropanol 
Retenons les esters de l’ecgonine ou pseudotropanol-2-carboxilique dont la cocaïne.

3. BIOGENESE DU NOYAU TROPANE

Il a été établi, grâce à l’utilisation d’éléments marqués (radioactifs) que les alcaloïdes des
Solanacées se forment dans les racines puis migrent au niveau des feuilles où ils ne subissent que des modifications
mineures.
La formation du tropanol fait intervenir l’ornithine et l’acide acétoacétique.

4. PROPRIETES PHARMACOLOGIQUES

Les propriétés pharmacologiques vont dépendre en grande partie de la stéréochimie du –


OH en position 3 du cycle tropane.

- chez les Solanacées le –OH a une configuration « E » (prendre comme repère l’azote
de l’hétérocycle), ce qui confère à ces alcaloïdes une activité parasympatholytique.

- Le –OH en « Z » (pseudotropanol) se retrouve dans les alcaloïdes anesthésiques


locaux des Erythroxylaceae.

Les alcaloïdes des Solanacées, dérivés du tropanol sont anticholinergiques, c’est-à-dire


qu’ils s’opposent aux effets du médiateur chimique du système parasympathique : l’acetylcholine. Les effets de cette
action sont variés suivant les organes :
- Œil : mydriase
E. Bassène Pharmacognosie 2009 0-185
- Vaisseaux : vasoconstriction
- Bronches : bronchodilatation
- Diminution du péristaltisme et des sécrétions intestinales et salivaires.

L’hyoscyamine est un antispasmodique intestinal puissant, excitant du système nerveux


central (SNC) (pouvant entraîner des hallucinations).
L’atropine a les mêmes propriétés que l’hoscyamine, mais son action est deux fois plus
faible.
La scopolamine est un puissant sédatif du SNC, antispasmodique intestinal.

LES SOLANACEES A ALCALOIDES DERIVES DU TROPANE

LA BELLADONE

Atropa belladonna
(Pharmacopée africaine O.U.A/CRST 1985)

1. ETUDE BOTANIQUE

Description
La balladone est une herbacée atteignant 1,50m de haut.
Les feuilles sont simples, entières, alternes, géminées au niveau des inflorescences. Les fleurs sont solitaires
ou alors groupées par deux à l’aisselle des feuilles géminées.
Le fruit est une baie noire contenant de nombreuses graines très petites.

Culture
La belladone est une plante européenne cultivée en France, Belgique, Angleterre et
Europe centrale.
Le multiplication est faite par semis de graines sélectionnées (secondairement par voie végétative). Le sol doit
être léger de préférence calcaire. On pratique l’écimage qui augmente la teneur des feuilles en alcaloïdes.

La drogue
Elle est constituée par les feuilles récoltées en début de floraison ; elles sont séchées dans des tunnels à 40-
50°C.
La drogue a une odeur légèrement vireuse, la saveur peu amère. Au microscope, la poudre est caractérisée par
des débris d’épiderme dont les cellules ont des parois sinueuses et une cuticule striées.

2. ETUDE CHIMIQUE

Les principes actifs de la feuille de belladone sont des alcaloïdes dérivés du tropane. On distingue :
des constituants banaux
- sels minéraux 15%
- scopolétol ou méthyl-6-esculoside (une coumarine). Ce constituant présente une fluorescence bleue en milieu
ammoniacal, permettant ainsi de distinguer la belladone des autres Solanacées

des alcaloïdes
Ils sont présents à raison de 0,3 à 1%. Ce sont des esters :
- du tropanol : Atropine et hyoscyamine constituent 90% des alcaloïdes totaux. On trouve également
l’atropamine, ester de l’acide tropique.
- du scopanol : la scopolamine ou hyoscine (5 à 10% des alcaloïdes).

4. ACTION PHARMACOLOGIQUE
L’activité de la plante est celle de l’atropine et de l’hyoscyamine (voir généralités).
A dose toxique on observe une excitation du SNC avec délires.

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5. ESSAIS ET DOSAGE DES ALCALOIDES

a / Essais botaniques
On peut rechercher les falsifications éventuelles par les autres belladones (Atropa acuminata ou belladone de
l’Inde admise par la pharmacopée internationale, et A. baetica ou belladone d’Espagne). La drogue doit
renfermer moins de 3% de tiges.

b/ Caractérisation des alcaloïdes


Outre les réactions de précipitation avec les réactifs généraux des alcaloïdes, on peut faire :
- Réaction de Vitali-Morin caractérisant le noyau tropane estérifié (Pharm. Afric.
1985). Les alcaloïdes sont traités avec l’acide nitrique, après évaporation à chaud, le résidu est repris par l’acétone en
présence de KOH (coloration violette).

- C.C.M. de silice avec l’extrait d’alcaloïdes bases totaux ; on élue par le système
acétone-eau-NH 0H (90-7-3) en présence de témoins d’atropine, d’hyoscyamine et
d’hyoscine. On observe deux taches correspondant l’une à l’atropine et l’hyoscyamine l’autre à
l’hyoscine (Pharm. Afric. 1985).

- Par chromatographie sur papier (éluant Butanol-acide acétique-eau 4-1-5), puis révélation au réactif iodo-
ioduré. L’atropine se colore en rouge, l’hyocyamine en bleu (leur teneur relative peut être ainsi appréciée).

c/ Dosage des alcaloïdes


La méthode la plus pratiquée est le dosage chimique par acidimétrie ; on observe les
étapes suivantes :
- Extraction et purification des alcaloïdes bases totaux (voir généralités),
- Elimination des bases volatiles en chauffant le résidu d’alcaloïdes bases au bain-marie après
dissolution dans du chloroforme,
- Dosage acidimétrique en retour recommandé par la Pharmacopée africaine (Voir généralités).

L’inconvénient de cette méthode est qu’elle ne permet pas de déterminer les proportions relatives
d’hyoscyamine et d’atropine qui n’ont pas la même activité. La teneur minimale en alcaloïdes est de 0,3M
exprimée en hyoscyamine.
Le dosage biologique qui détermine effectivement l’activité est peu pratiqué. Il consiste
à : mesurer la mydriase de l’œil énuclée de grenouille ou alors mesurer l’inhibition des contractions provoquées par
l’acétylcholine sur un intestin isolé de rat (test réalisé couramment au laboratoire de pharmacologie).

6. EMPLOIS DE LA BELLADONE

Les feuilles de belladone sont encore très employées pour :


- l'extraction des alcaloïdes totaux utilisés comme antispasmodique en association
avec certains purgatifs, antisecrétoire dans les ulcères gastro-duodénaux. Spécialités : BellafolineND, BelladenalND,
BellargalND . Les racines servent également à extraire
des alcaloïdes totaux.
- la préparation de teintures entrant dans des médicaments prescrits contre les toux d’irritation (coqueluche),
les coliques hépatiques et néphrétiques.
- la fabrication de cigarettes antiasthmatiques.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 2-185


LA STRAMOINE
Datura stramonium (D. tatula L.)
(Pharm. Afric. 1985)
1. ETUDE BOTANIQUE

Description

La Stramoine est une plante herbacée mesurant 30 à 150 cm de haut.


Les feuilles sont alternes, courtement pétiolées, découpées et dentées. Les fleurs isolées sont grandes et à
corolle blanche. Le fruit est une capsule ovoïde recouverte d’épines rudes.

La drogue
Elle est constituée par les feuilles. Les régions de culture sont les mêmes que celles de la belladone, la
multiplication se faisant par semis de graines sélectionnées. La sélection porte sur la richesse en alcaloïdes et sur une
plus grande facilité de récolte (variétés inermes à capsules lisses).
Les feuilles sont récoltées juste avant la floraison et desséchées rapidement. Ici l’écimage est également
pratiquée.
La coupe de feuille présente :
- des poils tecteurs pluricellulaires unisériés avec des parois épaisses et ponctuées.
- des macles d’oxalate de calcium dans le mésophylle.
Dans la poudre, on retrouve les mêmes éléments, notamment les poils tecteurs et les macles.

2. COMPOSITION CHIMIQUE

La composition en alcaloïdes est voisine de celle de la belladone. Les 2/3 des alcaloïdes totaux sont constitués
par l’hyoscyamine, contre 1/3 pour la scopolamine.
Il est intéressant de noter que les graines renferment les mêmes alcaloïdes.

3. ACTION PHYSIOLOGIQUE ET ESSAIS (voir belladone)

4. EMPLOIS
Le Datura officinal (-stramoine) est très peu utilisé ; il possède les mêmes indications que la belladone.
Spécialités : cigarettes Louis Legras, Cigarettes Schulze.
La scopolamine est utilisée dans le traitement de la maladie de Parkinson.
Spécialités : GenoscopolamineND . VagantylND.

LA JUSQUIAME D’EGYPTE (Hyoscyamus meticus)

C’est une plante vivace, très velue, poussant dans les zones désertiques d’Arabie,
d’Egypte et d’Iran. Elle possède des feuilles entières, des fleurs jaunes tachées de violet.
Les feuilles renferment 0,50 à 1% d’alcaloïdes. La pharmacopée internationale exige 0,80% minimum.
Atropine et hyoscyamine représentent 90% des alcaloïdes toaux non volatiles.
Atropine et hyoscyamine sont utilisés sous forme de sulfates (Codex tableau A) et de bromhydrates
(Hyoscyamine).
Ces alcaloïdes sont prescrits comme antispasmodiques du tractus digestif, des bronches et de la vessie;
antisécrétoires, mydriatiques (solution à 1% pour l'examen de fond d’œil,).
Spécialités : Duboisine Martinet collyre, AparoxalND (épilepsie), DibilèneND

LES DUBOISIA (Duboisia leichardtii)

Les Duboisias sont des arbres ou arbustes d’Australie et de la Nouvelle Calédonie. Les
feuilles de Duboisia leichardtii renferment 2 à 4% d’alcaloïdes surtout constitués d’hyoscyamine.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 3-185


Les feuilles Duboisia myoporoïdes donnent 0,6 à 3% d’alcaloïdes composés surtout de la scopolamine. On
rencontre plusieurs races chimiques à scopolamine.

DATURA METEL

Les feuilles figurent à la pharmacopée indienne comme source de scopolamine. C’est une
herbe annuelle mesurant 40cm à 1m de haut, poussant en Inde, Egypte, Sénégal…
Les feuilles renferment 0,50% d’alcaloïdes composées surtout de scopolamine.

Autres Daturas : Datura inoxia

LE COCAIER

Erythroxylon coca

1. ETUDE BOTANIQUE

Description
Le cocaier est un petit arbuste originaire de la Bolivie et du Pérou. Les feuilles sont isolées, stipulées, entières, ovales.
Les fleurs sont petites, blanches, groupées à l’aisselle des feuilles. Le fruit est une petite drupe rouge.

Culture et récolte
Le cocaier est cultivé depuis une longue date par les péruviens qui en font une grande consommation pour ses propriétés
existantes (masticatoire). L’arbuste est taillé afin qu’il ne dépasse pas 1,5m ce qui facilite la récolte ; celle-ci est
exclusivement manuelle. Les feuilles sont récoltées 3 à 4 fois par an, rapidement séchées à l’ombre ou dans des séchoirs
conditionnés.

Deux variétés de coca sont cultivées :


- variété bolivianum à grandes feuilles. Elle est la plus cotée (encore appelée Coca de Bolivie ou de
Huanuco).
- variété novogranatense à feuilles plus petites, cultivées au Pérou (coca du
Pérou).
Le coca de Java (var. spruceanum) est de composition chimique différente de celle des variétés précitées.

La drogue : La feuille est entière ovoïde, assez mince. On observe deux lignes très visibles de part et d’autre
de la nervure (traces de préfoliation). Au microscope : l’épiderme inférieur comporte des épaississements lui
donnant un aspect festonné.
La drogue se conserve très mal (perte de 50% des principes actifs après 4 ans de conservation).

2. COMPOSITION CHIMIQUE

Le coca de Bolivie et celui du, Pérou ont sensiblement la même composition chimique.

a- Principes banaux : la feuille renferme des tanins, des flavonoïdes et une huile essentielle.

b- Principes actifs :
- Les bases volatiles contenues dans les feuilles de Coca sont des dérivés N-méthylpyrrolidine : hygrines et
cuscohygrines.

- Les bases fixes sont des esters du pseudotropanol carboxylique (ou ecgonine). On
rencontre :

Ecgonine en très faible teneur (sinon signe de mauvaises conservation).

E. Bassène Pharmacognosie 2009 4-185


Monoesters acides : en traces (idem)
Diesters : la fonction acide de l’ecgonine est estérifiée par le méthanol, tandis que le OH est estérifié par un
acide variable. On trouve : la cocaïne (benzoylméthyl ecgonine), la cinnamoylcocaïne (sous forme de trace) et les
truxillines ou cocamines.

3. ACTION PHYSIOLOGIQUE
L’action de la drogue totale diffère de celles des alcaloïdes seuls.

a- Les alcaloïdes
La cocaïne, alcaloïde majeur, est l’anesthésique local type, de référence ; elle est utilisée pour les trois types
de d’anesthésie (surface, infiltration, conduction).
La cocaïne est un sympathomimétique de type adrénaline, donc vasoconstricteur. Cette propriété limite la
diffusion du produit, renforce l’action locale et minimise ainsi les risques d’accident nerveux.
Son action sur le SNC se traduit à faible dose par une action stupéfiante. L’intoxication chronique s’installe
(cocaïnomanie). La cocaïne est une drogue dure. La cocaïne possède une action défatigante sur le muscle strié.
Les autres alcaloïdes ont une action beaucoup plus faible. L’ecgonine et les hygrines sont dépourvues
d’action.

b- La drogue entière
Elle possède une action tonique et défatigante due à la cocaïne et aux tanins.
Noter que la drogue débarrassée des alcaloïdes conserve en partie cette action défatigante tonique recherchée
dans certaines boissons.
Les feuilles de coca utilisées comme masticatoire ont le même effet, provoquant en plus un fourmillement de
la langue (anesthésie locale). Une intoxication chronique peut en résulter.

4. ESSAIS

a - Botaniques (voir l'aspect de la feuille)


b- Physico-chimiques
- CCM : caractérisation de la cocaïne
- Les alcaloïdes non volatils sont dosés par la méthode pondérale (voir
généralités) après élimination par chauffage sous vide des alcaloïdes volatils. Cette méthode a l’inconvénient de doser
en même temps les ecgonines libres non actives.
- Le dosage biologique peut être effectué pour appréciation de l’action anesthésique sur la
cornée du lapin (test de Régnier).

5. EMPLOIS DES FEUILLES DE COCA

- Masticatoire défatigant, euphorisant, anorexigène, souvent associé à de la cendre ou de la chaux.


- Formes galéniques : la poudre de feuille est utilisée en infusion pour gargarisme (anesthésique local).

- Extraction de la cocaïne
Elle est faite de manière licite au Pérou et aux USA. On utilise le chlorhydrate de cocaïne comme anesthésique
local aux doses de 0,03 à 0,06g maximum.

CONCLUSION

Seulement 5% de la production de feuilles de coca sont employés dans l’industrie pour la production licite de
cocaïne ; la quasi totalité est donc utilisée à des fins masticatoires ou pour la production illicite de cocaïne utilisée
comme drogue. C’est le cas en Colombie où le cartel de Médéline organise la production artisanale de cocaïne.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 5-185


GENERALITES SUR ALCALOÏDES INDOLIQUES

1. DEFINITION

Les alcaloïdes indoliques renferment dans leur structure un noyau indole et ses dérivés (dihydro-indole et
oxindole).
Ce sont généralement des alcaloïdes sympathomimétiques rencontrés chez les Rubiacea (yohimbe) et les
Apocynaceae (Rauwolfia, Petite Pervenche). Certains sont actifs contre les tumeurs (Pervenche de Madagascar).
Il faut enfin remarquer que la découverte des alcaloïdes indoliques a marqué un grand pas dans le traitement
de l’hypertension artérielle (Réserpine) et des leucémies (Vincaleucoblastine).

2. CLASSIFICATION

Les alcaloïdes indoliques sont habituellement classés en deux groupes selon leur origine biogénétique :

Les alcaloïdes indolomonoterpéniques


On y trouve, lié au noyau indole, un reste monoterpène (voir huiles essentielles). On trouve dans ce groupe les
alcaloïdes des Rauwolfia, des pervenches et des Strychnos.

Les alcaloïdes indolo-isoproéniques


Le reste hydrocarboné lié au noyau indole est moins condensé et correspond à une molécule d’isoprène (voir
biogenèse des terpènes). Les alcaloïdes de l’Ergot de seigle appartiennent à ce groupe.

3. BIOGENESE

Le noyau indole dérive du tryptophane qui réagit avec différents substrats selon
l’alcaloïde considéré : avec le sécologanoside pour donner les alcaloïdes des Rauwolfias, et avec l’acide mévalonique
pour donner les alcaloïdes de l’Ergot de seigle (voir monographies).

E. Bassène Pharmacognosie 2009 6-185


ALCALOÏDES INDOLO-MONOTERPENIQUES

LES RAUWOLFIAS

Les Rauwolfias appartiennent à la famille des Apocynaceae. Leur intérêt thérapeutique, très grand, est dû à la
présence dans leurs racines d’alcaloïdes indoliques ou indoliniques possédant des propriétés sédatives,
antihypertensives et/ou anti-arythmiques.
On rencontre plusieurs espèces dont R. vomitoria originaire d’Afrique et R. serpentina d’origine asiatique.
R. serpentina est une plante de la pharmacopée traditionnelle de l'Inde où il est connu sous le nom
« Sarpagandha ». Il y fut utilisé comme fébrifuge et anti-épileptique. Ce n’est qu’en 1952 que fut isolée de ses racines
la réserpine qui se révéla comme un anti-hypertenseur majeur et un tranquillisant.
L’intérêt grandissant de la réserpine va stimuler la culture de R. serpentina et la recherche d’autres espèces
hors d’Asie. C’est ainsi que furent découverts R. vomitoria en Afrique et R. tetraphylla en Amérique. Ces deux espèces
se sont révélées plus intéressantes pour l’extraction industrielle de la réserpine (car plus riches en alcaloïdes).
Aujourd’hui la réserpine a en partie perdu de son intérêt au profit des autres alcaloïdes présents dans la plante
et utilisés à d’autres fins : la raubasine (vasodilatateur périphérique) et l’ajmaline (antiarythmique proche de la
quinidine).

1. ETUDE BOTANIQUE

DESCRIPTION
Les Rauwolfias sont des arbres ou des arbustes des régions tropicales humides. Les
Feuilles sont entières, ovales, verticillées par 3,4 ou 5. Les fleurs de type 5 sont de petite taille, blanches, régulières et
disposées en cymes. Le fruit est une baie, la racine est pivotante.

HABITAT
R. vomitoria est une espèce des formations secondaires, répandues dans toute l’Afrique intertropicale (Sénégal,
Mali). Au Sénégal, il n’est fréquent qu’en Casamance maritime où il croît à proximité des rizières et sur les sols frais.

LA DROGUE
Elle est constituée par les racines.
Les racines de R. vomitoria se présentent en morceaux cylindriques de forme droite et de grandes dimensions ;
leur diamètre est nettement plus grand que celui des autres Rauwolfias. La surface est jaune-brun, striée
longitudinalement. Le suber s’exfolie facilement, la cassure est régulière et la saveur très amère.
Parmi les éléments anatomiques caractéristiques on note la présence d’un suber stratifié, de cellules
scléreuses dans le parenchyme cortical et d’un bois hétérogène possédant des vaisseaux d’un grand diamètre (100µ).
La drogue provient essentiellement de plantes cultivées ; la multiplication se fait généralement par
éclats de souches. La récolte se fait sur des arbustes âgés de 3 à 4 ans ; les racines secondaires sont périodiquement
prélevées, débarrassées des radicelles séchées puis coupées.

2.BIOGENESE

La biogenèse des alcaloïdes des Rauwolfias a pour point de départ le tryptophane. Celui-ci est décarboxylé en
tryptamine ; la condensation de celle-ci avec le sécologanoside donne la strictosidine à partir de laquelle se forme la
geissochizine, précurseur de tous les alcaloïdes indolomonoterpéniques des Rauwolfias.

3. COMPOSITION CHIMIQUE

En dehors des principes banaux (amidon, tanins, stérols…), les principes actifs sont des alcaloïdes indoliques
dont le principal est la réserpine.
La racine entière de R. vomitoria renferme 2 à 3% d’alcaloïdes concentrés dans les écorces ; ainsi elle est
l’espèce la plus riche en alcaloïdes totaux et en réserpine (50% des alcaloïdes totaux).
Les alcaloïdes sont classés en 4 groupes : yohimbane, hétéroyohimbane, sarpagine, ajmaline.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 7-185


a) Alcaloïdes du groupe de l’yohimbane
La structure est pentacyclique avec 2 atome d'azotes. On relève 3 carbones chiraux situés en 3, 15, 20 et qui
sont à l’origine de plusieurs isomères. L’isomèrie est déterminée par la position en  ou en  des substituants sur ces
carbones.
Ainsi on note 4 configurations selon les combinaisons et qui déterminent les séries normale (3, 15, 20), pseudo
(3, 15, 20), allo (3, 15, 20), 3 épi-allo (3, 15, 20).
Par ailleurs, une autre isomérie est introduite par les positions axiale ou équatoriale des substituants en 16, 17
et 18.
Selon la présence ou l’absence d’un substituant en 18, on distinguera deux sous-groupes :
- Le sous-groupe de l’yohimbine (non substitué en 18). Ce groupe est de moindre importance chez
les Rauwolfias, très important par contre chez les Rubiacées comme Pausinystalia yohimbe.
- Le sous-groupe de la réserpine (substitué) est le plus important. Ces alcaloïdes
sont caractérisés par la présence d’un méthoxy (-OCH3) en 17 et d’une fonction alcool secondaire en 18 estérifiée par
un acide variable. Le chef de file de ce groupe est la réserpine (ester benzoïque du réserpate de méthyle) de
configuration 3 épi-allo.
A côté de la réserpine on a la rescinnamine (ester de l’acide triméthoxycinnamique) et la déserpidine ou
démethoxy 11-réserpine.

b) Alcaloïde du groupe de l’hétéroyohimbane


Le cycle noté E est un hétérocycle oxygèné. On rencontre également deux sous-groupes : Les alcaloïdes du
sous-groupe de la raubasine qui sont des bases faibles ; ceux du groupe de la serpentine où le cycle C est aromatique,
sont des bases très fortes et solubles dans l’eau.
Remarque : la raubasine est préparée dans l'industrie à partir de la serpentine, par réduction.

c) Les alcaloïdes du groupe de la sarpagine


Ce sont des bases tertiaires ayant un hydroxyle phénolique et une fonction alcool primaire. Le principal est la
sarpagine ou raupine.

d) Les alcaloïdes du groupe de l’ajmaline


Ils ont une structure indolinique, méthylée à l’azote et hydroxylée.

Remarques importantes
Les alcaloïdes des Rauwolfias ont un caractère basique plus ou moins prononcé. On rencontre des bases très
faibles (réserpine, rescinnamine), des bases faibles (raubasine, ajmaline), enfin des bases très fortes (serpentine). Ces
bases auront donc une différence de solubilité, mise à profit pour leur extraction. Ainsi la réserpine peut être séparée
des autres alcaloïdes par extraction au chloroforme en milieu acide (contrairement au cas général, voir généralités).

4. ACTION PHYSIOLOGIQUE
Il convient de distinguer l’action des alcaloïdes pris séparément, et l’action de la drogue totale.
L’yohimbine a un effet adrénolytique, vasodilatateur périphérique pouvant agir sur les organes sexuels
(aphrodisiaque).

La réserpine agit :
- sur le SNC : on observe une action dépressive voisine de celle des neuroleptiques ; ce qui l’a fait
utiliser jadis dans les troubles mentaux. L’action est sédative et hypnotique sans analgésie ni
anesthésie.
La réserpine inhibe l’hyperactivité provoquée par la caféine, l’amphétamine ou la cocaïne.
- sur le SNA : l’action se traduit par une hypotension progressive et particulièrement prolongée.

Mécanismes d’action : la réserpine provoque la déplétion en noradrénaline au niveau des fibres post-ganglionnaires
sympathiques, ceci en inhibant le mécanisme de recaptage granulaire de la noradrénaline et celui des monoamines
(dopamine et 5OH tryptamine).

Effets secondaires : l’effet le plus important est l’action ulcérogène se traduisant par une augmentation des sécrétions
en général et gastriques en particulier (on observe notamment une galactorrhée).
L’implication de la réserpine et des alcaloïdes des Rauwolfias dans la survenue du cancer du sein a été établi
en 1974 (1) mais demeure controversée (2) [(1) Lancet (1974), 2, 669-671. (2) Eur. J. Clin. Pharmacol. (1984), 26,
143-146].

E. Bassène Pharmacognosie 2009 8-185


La raubasine : est une adrénolytique, vasodilatateur périphérique qui augmente le flux sanguin musculaire et
cérébral. Cette action est synergique de celle des alcaloïdes hydrogénés de l’Ergot de seigle.

La serpentine : est un hypotenseur puissant, non adrénolytique

L’ajmaline est un antiarythmique majeur dont l’effet se rapproche de celle de la quinidine (voir quinquinas).
Elle est utilisée en particulier dans les troubles du rythme ventriculaire. Son action antihypertensive est faible,
forte dose on a arrêt cardiaque.

Relation structure activité


Le squelette yohimbane est nécessaire à l’action adrénolytique.
La configuration 3 épi-allo est indispensable à l’activité neurosédative et antihypertensive. De même la nature
de l’acide estérifiant en 18 influe sur l’intensité de l’action neurosédative.

Action de la drogue totale


Les racines de Rauwolfia ont des propriétés sympatholytiques et antihypertensives. On observe à faible dose
une baisse prolongée de la pression artérielle, à forte dose un effet sédatif sur le SNC accompagnée d’une dépression
cardiaque et respiratoire.

5. ESSAIS

ESSAIS BOTANIQUES

On cherchera notamment sur une coupe les éléments de distinction des différents Rauwolfia (suber stratifié ou
non,cellules scléruses…).

ESSAIS PHYSICO-CHIMIQUES
- Réactions générales des alcaloïdes
- Caractérisation par CCM en présence de témoin de réserpine et d’ajmaline. On révèle les plaques à
l’UV ou la réserpine apparaît en jaune verdâtre, l’ajmaline en bleu foncé. Avec l’iodoplatinate, la
réserpine apparaît en rose et l’ajmaline en violet.
- Dosage des alcaloïdes type réserpine, comme l’indique la Pharmacopée africaine 1985 (page 200).
- Dosage des bases faibles.

6. EMPLOI DES RAUWOLFIAS

Les formes galéniques obtenues à partir de R. sepentina (seule officinale) sont d’un usage très restreint. Les
autres (R. vomitoria et R. tetraphylla) sont les plus utilisés et cela pour l’extraction des alcaloïdes.
La réserpine est inscrite à la Pharmacopée française IXè Ed., utilisée comme neuroleptique et
antihypertenseur à la dose de 0,50-1,50 mg/24H. Spécialités : SERPASIL, TENSIONORME.

La rescinnamine : Antihypertenseurs associés à des diurétiques : ANAPREL, ALDATENSE

Methoxy 10 déserpidine : Action antihypertensive (BARONORME)

La raubasine : vasodilatateur dans la pathologie cérébrale périphérique seul (HYDROSARPAN) ou associée


aux alcaloïdes hydrogènes de l’Ergot de seigle (ISKEDYL).
L’ajmaline : Inscrite à la pharmacopée française IXè Ed. ; indiquée dans les tachycardies ventriculaires, seule
à la dose de 0,05-0,025 g/24H, en association avec des sédatifs nerveux.
Autres dérivés : Il existe de nombreux dérivés hémi-synthétiques où l’on pu dissocier les effets sédatifs des
effets hypnotiques et où les effets secondaires sont moindres (diminution des effets sécrétoires notamment). Parmi les
dérivés de la réserpine on peut citer : la biétaserpine ou diéthyl-aminoethyl-réserpine, hypotenseur (TENSIBAR), la
syrosingopine ester de l’acide carbéthoxy-syringoïque (SINGOSERP).

E. Bassène Pharmacognosie 2009 9-185


Racines pulvérisées

Alcool acétique

Solution alcoolique
des alcaloïdes totaux

H2O/H2SO4

Solution aqueuse acide

CHCl3

Solution chloroformique : Phase aqueuse :


alcaloïdes groupe réserpine autres alcaloïdes

Evaporation
+ alcool +Na2NO2
Résidu Spectrophotométrie
+ H2SO4
+ Sulfamate d'ammonium

DOSAGE DES BASES FAIBLES DES RAUWOLFIA

E. Bassène Pharmacognosie 2009 10-185


APOCYNACEAE SOURCES DE VINCAMINE

1. LA PETITE PERVENCHE : VINCA MINOR

a) BOTANIQUE

La petite pervenche est une plante herbacée, vivace poussant dans les sous-bois.
Elle possède des tiges sarmenteuses couchées et des tiges florifères dressées. Les feuilles sont entières, persistantes.
La petite pervenche ou Pervenche officinale est cultivée dans les pays à climat tempéré (Europe de l’Est
notamment). La drogue est constituée par les feuilles.

b) COMPOSITION CHIMIQUE

Les principes actifs sont des alcaloïdes indolomonoterpéniques (0,4 à 1% du poids sec) dont
le principal est la vincamine (10 à 15%).
On rencontre des alcaloïdes secondaires tels que la vincadifformine.

c) ACTION PHYSIOLOGIQUE

Les feuilles de la petite Pervenche furent utilisées comme astringent et vulnéraire en usage
externe, antilaiteux par voie interne. Aujourd’hui, la drogue est utilisée pour l’extraction des alcaloïdes totaux, la
vincamine étant obtenue par d’autres voies.
Les alcaloïdes sont sympatholytiques, vasodilatateurs périphériques. Ce sont en particulier des oxygénateurs et
vasorégulateurs cérébraux.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 11-185


d) EMPLOIS

La petite pervenche sert à l'extraction des alcaloïdes totaux spécialisés sous le nom de RUTOVINCINE. La
vincamine, obtenue par hémisynthèse à partir de la tabersonine, est prescrite dans les troubles psycho-
comportementaux de la sénescence cérébrale et les troubles post-commotionnels des traumatisés crâniens (trouble
de la mémoire et de l’attention).
Spécialités : PERVINCAMINE, PERVONE…

2. LES VOACANGA : VOACANGA AFRICANA ET V. THOUARSII

Les graines de ces Apocynacées renferment un alcaloïde indolique : la tabersonine.


La récolte se fait avant la déhiscence du fruit, en Octobre-Novembre pour V. africana et en Juin-Juillet pour
V. thouarsii. Les graines renferment 2 à 3% de tabersonine.
La tabersonine donne par hydrogénation de la vincadifformine qui est à son tour oxydée par un peracide en
vincamone qui donne à son tour la vincamine.

LA PERVENCHE DE MADAGASCAR : CATHARANTHUS ROSEUS, APOCYNACEAE

1. ETUDE BOTANIQUE

La Pervenche de Madagascar est un sous-arbrisseau, très répandu dans les régions tropicales. La tige ligneuse,
atteignant 80 cm de haut, porte des rameaux dressés. Les feuilles sont coriaces, oblongues, opposées. Les fleurs de
type 5, sont blanches à rose violacé. Le fruit est une follicule double renfermant de nombreuses graines.

La drogue est constituée, d’une part par les parties aériennes, d’autre part par les racines (ces deux parties n’ayant
pas le même usage). Elle est obtenue à partir des plantes de culture (Madagascar, Australie, USA, Amérique du sud).

2. COMPOSITION CHIMIQUE

Nous distinguerons la chimie des parties aériennes et celle des racines.


Parties aériennes
Les feuilles et tiges renferment 0,2 à 1% d’alcaloïdes indoliques et indoliniques très variés parmi lesquels on
distingue :

- Alcaloïdes monomères quantitativement plus importants mais dépourvus d’intérêt


pharmacologique : vindoline et catharanthine.

- Alcaloïdes dimères, bisindoliques avec un noyau indole et un indoline. Ces


alcaloïdes représentent seulement 0,01% de la drogue mais sont doués de propriétés mitoclassiques :
Vincaleucoblastine (VLB), vincristine (VCR), leurosine et leurosidine.

Remarque : Vu la très faible teneur de ces alcaloïdes, de nombreuses hémisynthèses et même des synthèses
totales ont été tentées (cette dernière a semble-t-il été réussi).

Chimie des racines


Les racines de C. roseus renferment des alcaloïdes du type hétéroyohimbane dont le plus important est la
raubasine (Conférer à Rauwolfia).

3. ACTION PHYSIOLOGIQUE

Les différentes parties de la plante sont utilisées depuis fort longtemps en médecine populaire comme
antidiabétique, dépuratif, fébrifuge, vermifuge, etc…
L’activité antitumorale est devenue prépondérante. Elle a été découverte fortuitement lors de la recherche du
principe antidiabétique (les animaux d’expérience décédaient de leucopénie).

E. Bassène Pharmacognosie 2009 12-185


Les alcaloïdes dimères sont responsables de l’action oncholytique. La VLB est un antimitotique inhibant la
biosynthèse des ADN et ARN solubles (blocage de la formation des microtubules). La VCR a la même activité, mais
plus forte et plus toxique. La toxicité se manifeste par une neutropénie et une neuropathie.

4. EMPLOIS

Les parties aériennes servent à l’extraction de la VLB et VCR. Le sulfate de vinblastine est utilisé en perfusion
i.v. lente, une dose de 0,1 à 0,5 mg/kg tous les 7 jours, dans le traitement de la maladie de Hodgkin, les
lymphosarcomes, les réticulosarcomes, les leucémies aiguës…
Le sulfate de vincristine est également administré en perfusion i.v. lente, essentiellement dans les leucémies
lymphoblastiques aigues. La surveillance du traitement est très stricte.
Spécialités : ONCOVIN (VCR), VELBE (VLB).

De nombreux dérivés des alcaloïdes dimères du Catharanthus ont été synthétisés, un seul est commercialisé :
Vindésine préparée à partir de la VLB :
Spécialité : ELDISINE (sulfate).

L’ERGOT DE SEIGLE : CLAVICEPS PURPUREA, ASCOMYCETES

1. DEFINITION

L’ergot de seigle est la forme de résistance (sclérote) de Claviceps purpurea, un champignon parasite du seigle.
La drogue a des propriétés ocytociques, vasoconstrictrices et sympatholytiques. Ces propriétés sont dues à la
présence d’alcaloïdes indoloisopréniques.
Les ergots de riz, de blé et d'avoine ont été tolérés par la 7è Ed. de la Pharmacopée française.

2. ETUDE BOTANIQUE

Cette étude biologique est dominée par le cycle évolutif du champignon.

a) Cycle évolutif
Ce cycle comprend deux phases :

- La phase sexuée : le sclérote formé sur les épis de seigle tombe au sol à la fin
de l’été et y passe l’hiver. Au printemps suivant apparaissent des stromas (corpuscules pédicellés) qui sont les organes
de la reproduction sexuée. Ces stromas renferment des ascospores filiformes contenus dans des asques (sacs), ces
derniers logés dans des périthèces (cavités situées à la périphérie des stromas).
Les ascospores sont libérés des stromas et véhiculés par le vent ou les insectes jusqu’aux fleurs de seigle.
- La phase asexuée : avec la faveur de l’humidité, les ascospores germent sur les fleurs de seigle,
donnant des filaments (hyphes) qui envahissent les ovaires. Ces ovaires sont transformés en des masses blanchâtres
appelées sphacélies. Dans les sphacélies se forme un liquide visqueux, sucré (ou miellée du seigle) qui englue des
conidies (organes de la reproduction asexuée.
Les insectes attirés par la miellée, disséminent les conidies sur d’autres fleurs de seigle.
Les ovaires ainsi envahis de hyphes avortent et se transforment en une masse compacte dont la base s’allonge et devient
cornée pour constituer le sclérote. Le cycle recommence au printemps suivant.

b) Culture et récolte
Les ergots sauvages (spontanés) sont rares de nos jours. On les trouve en Europe Centrale (Pologne, Hongrie)
en en URSS.
Pour les besoins de l’industrie pharmaceutique, l’ergot est obtenu par infestation artificielle des champs de
seigle cultivé à cette fin. La production est dominée par les Laboratoires Sandoz de Suisse et des USA.
Le support de culture est constitué par un seigle à floraison tardive afin d’éviter de contaminer d’autres
céréales. Pour augmenter le rendement en sclérotes, on peut choisir des variétés de seigle tétraploïdes, moins
résistantes à l’infection.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 13-185


Par ailleurs les souches de claviceps sont sélectionnées pour leur richesse en alcaloïdes totaux ou pour leur
richesse en un constituant particulier .

Obtention des conidies : Les spores de races sélectionnées sont semées dans des tubes renfermant un milieu
nutritif riche en glucides. Il se développe un mycélium qui donne une multitude de conidies. Celles-ci sont récupérées
et serviront à infester les champs de seigle.
L’infestation des champs se fait par pulvérisation ou par infection de préférence. Dans cette dernière méthode,
on pique les ovaires à l’aide de pointes creuses reliées à la suspension de conidies (l’opération est mécanisée). Au bout
de 15 jours apparaît la miellée de conidies qui répand l’infection. La production de sclérote est favorisée par un temps
chaud et humide. Le rendement est d'environ 200 kg/ha.
La première récolte (mécanisée) se fait avant maturité complète des sclérotes (avant qu’ils ne tombent sur le
sol). La deuxième se fait 15 jours après la première et correspond aux sclérotes issus de l’infestation par les insectes
à partir de la miellée.

c) La drogue-conservation
Les sclérotes sont des masses allongées plus ou moins arquées, amincies aux deux extrémités ; ils mesurent 1-
4 cm de long sur 2-7 de section (l’ergot de culture est généralement plus gros que le sauvage). La surface est noir
violacé avec plusieurs sillons longitudinaux. La cassure est nette, blanchâtre au centre.
Les ergots se conservent mal, surtout en milieu humide (attaque des insectes et des moisissures). On les
conserve dans des flacons bien bouchés renfermant un déshydratant comme la chaux. Le stock doit être renouvelé
fréquemment car les alcaloïdes s’isomérisent au cours de la conservation et deviennent inactifs.

3. BIOGENESE DES ALCALOÏDES

La possibilité de réaliser des cultures saprophytiques de l’ergot de seigle a facilité l’étude de la biosynthèse
des alcaloïdes. Cependant seules les grandes étapes sont cernées.
Les alcaloïdes de l’ergot dérivent d’une structure de base, Ergoline, noyau tétracyclique comportant une
structure quinoléine octahydrogénée que l'ont retrouve dans l’acide lysergique. Les alcaloïdes sont des dérivés de cet
acide.
Les précurseurs de l’acide lysergique sont le tryptophane, l’acide mévalonique et la méthionine qui apporte le
méthyle substituant l’azote en 6.

4. COMPOSITION CHIMIQUE

La composition chimique de l’ergot de seigle est très complexe. On distingue :

a) Principes banaux
- eau, minéraux, glucides.
- aminoacides très variés : Leucine, Valine, Tyrosine, Arginine, Tryptophane.
- Forte teneur en lipide (20 à 40%) renfermant des acides gras insaturés ; le rancissement facile de
cette huile est à l’origine de la mauvaise conservation de l’ergot.
- Matières colorantes dérivant des chromones (ergoflavine) et des anthraquinones (sclérérythrine)
de couleur rouge.

b) Les principes actifs


Parmi les principes actifs, on trouve des amines, des ammoniums quaternaires et surtout des alcaloïdes
indoliques.

- Les amines : histidine, tyramine, methylamine, éthylamine, putrescine, cadavérine, histamine.


- Les alcaloïdes, de teneur comprise entre 0,15 et 1%.Les alcaloïdes carboxylés sont dérivés de l'acide
D-lysergique ou de l'acide D-isolysergique (l'isomérie se situe au niveau du C-7 portant le carboxyle). Noter que l'on
retrouve les deux formes pour chaque alcaloïde.
Les alcaloïdes sont classés en trois groupes principaux :

Les clavines et les sécoergolines qui ne comportent pas de carboxyle en 8. Leur teneur est
très faible et n’ont pas d’intérêt thérapeutique.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 14-185


Les alcaloïdes hydrosolubles qui représentent 20% du totum alcaloïdique. Ce sont des amides
simples de l’acide lysergique. Le plus important est l’ergométrine (appelée ergobasine ou ergonovine) dans laquelle
l’acide lysergique est amidifié par du () amino 2 propanol.

Les alcaloïdes polypeptidiques ou « ergopeptines » représentent 80% des alcaloïdes totaux ;


sont insolubles dans l’eau. Ces alcaloïdes donnent par hydrolyse de l'acide lysergique et des acides aminés
(hydroxyalanine, leucine ou valine, proline).
On distingue 5 alcaloïdes, différents par la composition de leur chaîne peptidique et classés en deux groupes :

* Le groupe de l’ergotamine composé de : Ergotamine, Ergosine, Ergovaline


* Le groupe de l'ergotoxine : mélange où domine l'ergocornine à côté de l'ergocristine et de
l'egocryptine.

5. ACTION PHYSIOLOGIQUE

La toxicité de l’ergot de seigle est connue depuis le moyen âge. Les farines souillées étaient à l’origine de fléau
épidémique nommé ergotisme , populaire sous les nom de «mal des ardents » ou « feu de Saint-Antoine ».
L’intoxication se manifeste par des brûlures d’estomac et la gangrène des extrémités ou alors par des
convulsions.
L’activité de l’ergot est due à la fois aux amines et aux alcaloïdes. Elle se manifeste sur le SNC, le SNA
sympathique et sur les fibres lisses.
Sur le SNC, on observe une excitation pouvant se traduire par des hallucinations ; une vasodilatation d’origine
centrale due surtout au groupe de « l’ergotoxine » (l'action est antisérotonine).

L’action sur le SNA se traduit par une action adrénolytique avec effet antihypertenseur et antisérotinine.
Par ailleurs, on observe une vasoconstriction des vaisseaux et une contraction de l’utérus (effet observé notamment
avec la tyramine).

Action sur les fibres lisses : On observe une action ocytocique due à l’ergométrine, l’ergotamine et
l’ergotoxine, action non accompagnée d’hypertension car compensée par l’histamine et l’action adrénolytique des
alcaloïdes.

Relations structure-activité

L’action sur le SNC est due au motif ergoline, analogue structural des amines biogènes (Dopamine,
noradrénaline, sérotonine) d’où l’affinité de ces alcaloïdes pour des récepteurs de ces amines. Cette analogie structurale
est retrouvée chez un dérivé de synthèse, la LSD25, puissants hallucinogènes prohibés.
Les dérivés de l’acide lysergique sont plus actifs que ceux de l’acide isolysergique. L’action sympatholytique
est due aux polypeptides car l’ergométrine ne possède pas cette activité. D’autres paramètres interviennent notamment
la double liaison en 9-10 importante pour l’action ocytocique (la dihydroergotamine est inactive sur l’utérus).

Autres actions des alcaloïdes de l’ergot

Pour certaines clavines, on a observé une activité antitumorale (Planta Medica (1986), n°4, 290). La relation
structure-activité suivante a été observée : parmi les clavines naturelle, seules sont actives les 8-methyl ergolines. Les
ergolines ayant un oxygène en 17 sont moins actifs que les non substitués par un oxygène ; les hydroxyméthylergolines
deviennent actives par propylation sur l’azote 1.

6. ESSAIS DE L’ERGOT

a) Essais botaniques

E. Bassène Pharmacognosie 2009 15-185


Ces essais sont peu importants car l’ergot de seigle est rarement falsifié car
facilement reconnaissable par sa forme. L’odeur de la poudre est désagréable et est exaltée lorsqu’on triture la poudre
avec un alcali.

b) Essais physico-chimiques

- La caractérisation des pigments anthraquinoniques peut avoir un intérêt dans la détection de


l’ergot dans les farines : la farine additionnée de H2SO4 est extraite par l’éther qui se colore en rose progressivement ;
la solution éthérée est agitée avec une solution aqueuse de carbonate de sodium, celle-ci prend une coloration violacée.

- Caractérisation des alcaloïdes


Les réactifs généraux des alcaloïdes sont très peu sensibles en raison de la très faible teneur en alcaloïde de
l’ergot de seigle et à la présence d'alcaloïdes peptidiques

On effectue plutôt la réaction de caractérisation du noyau indole utilisant le paradimethylamino-benzaldéhyde


(ou réaction de VAN URK de coloration violette).

- L’identification des alcaloïdes est réalisée par CCM en présence de témoins d’ergotamine et
d’ergométrine (révélée par réaction de VAN URK).

- Le dosage des alcaloïdes totaux est colorimétrique et correspond à la détermination des alcaloïdes
totaux obtenue sous forme de tartrates. On applique la réaction de VAN URK. L’ergot officinal doit contenir un
minimum de 0,15% d’A.T. calculés en ergotamine. Certaines pharmacopées demandent de doser les alcaloïdes
hydrosolubles.
Les essais biologiques sont peu pratiqués mais peuvent permettre une appréciation plus juste de l’activité
pharmacologique de la drogue : mesure de l’action ocytocique sur l’utérus de cobaye vierge, mesure de l’activité
vasoconstrictrice périphérique sur la crête de coq (Pharmacopée américaine).

. 7. EMPLOIS DES ALCALOÏDES DE L’ERGOT

L’ergot de seigle est aujourd’hui utilisé uniquement pour l’extraction des alcaloïdes à partir desquels de
nombreux dérivés hémisynthétiques sont préparés.
L’ergométrine donne le méthylergométrine utilisé sous forme de maléate comme tonique utérin et
ocytocique ; il est prescrit pour la prévention des hémorragies du post-partum.

Spécialité : METHERGIN gouttes.

Le Méthysergide (maléate) est utilisé dans le traitement de fond de la migraine à la dose de 2 à 8 mg/jours per
os ;
Spécialité : DESERNYL.

L’ergotamine (tartrate) est exclusivement réservée au traitement de la crise de migraine en association avec
la caféine per os ou par voie rectale ;

La dihydroergotamine (méthane sulfonate) est prescrite comme antimigraineux dans le syndrome


orthostatique, per os 1 à 2 mg/jour.

La dihydroergotoxine prescrite dans le traitement des troubles vasculaires cérébraux ; per os 1 à 2 mg/jour.
Spécialités : HYDERGINE, ISKEDYL

La nicergoline est un adrénolytique puissant prescrite dans les mêmes indications que la dihydroergotoxine,
sans effet indésirable notable : SERMION.

La bromocriptine (méthane sulfonate de bromo-2-ergocritptine) freine la sécrétion de prolactine et est utilisée


comme inhibiteur de la lactation dans les hypogonadismes chez l’homme et la femme. Spécialité : PARLODEL.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 16-185


LES QUINQUINAS

Les quinquinas sont des Rubiaceae originaires d’Amérique du Sud, où ils croissent à l’état sauvage dans la
Cordillère des Andes, sur le versant oriental humide des différentes chaînes. C’est au XVIIè siècle que des
Missionnaires Espagnols après la découverte du Pérou, ont reconnu les vertus fébrifuges des écorces de quinquinas.
Bien plus tard, ces plantes furent classées dans le genre Cinchona par LINNE en 1742.
Ce nom étant attribué en l’honneur de la princesse Chinchon, femme du Vice-Roi du Pérou, qui aurait été guérie des
fièvres par ces écorces.
A cause de l’intérêt grandissant de ces plantes, elles furent introduites et cultivées dans plusieurs pays. Les
quinquinas sont actifs par la présence d’alcaloïdes dont le plus important est la quinine. Cet alcaloïde isolé pour la
première fois en 1820 par les Pharmaciens PELLETIER et CAVENTOU, s’est révélé un antipaludéen majeur.
Par la suite d’autres alcaloïdes extraits des quinquinas se sont révélés intéressants en particulier la quinidine qui a des
propriétés antiarythmiques.
Actuellement quatre espèces de quinquina sont exploitées : Cinchona succirubra (quinquina jaune), C.
ledgeriana (variétés de quinquina jaune) et C. officinalis (quinquina gris).

1. ETUDE BOTANIQUE

DESCRIPTION DE LA PLANTE

Les Cinchona sont des arbres de 10 à 15 m de haut, à feuilles opposées, pétiolées, pourvues à la base de 2
stipules. Leur limbe est elliptique plus ou moins ovale penniverve.
Les fleurs, en grappes de cimes terminales, sont régulières, du type 5, blanches ou rosées. Le calice présente 5
dents, la corolle est tubuleuse puis évasée en 5 lobes.
Le fruit est une petite capsule ovale-oblongue, à déhiscence septicide par 2 valves. Les graines sont petites,
ailées, aplaties.
Il existe de nombreuses espèces du genre Cinchona (40). On exploite notamment les espèces suivantes : C.
succirubra, C. calissaya, C. officinalis, C. ledgeriana. Il existe également des hybrides : C. hybrida, issu du
croissement de C. ledgeriana x C. succirubra, C. robusta issu de C. succirubra x C. officinalis.

Culture et récolte
Actuellement les quinquinas sauvages ont une importance mineure par rapport aux quinquinas de culture.
Les premières cultures de quinquinas furent entreprises en Asie (Java) par les Hollandais et les Anglais dans
la 2ème moitié du 19ème siècle. Les Hollandais ne tarderont pas à avoir le monopole de la quinine grâce à leurs plantations
de Java, où étaient opérées des sélections rigoureuses. Le marché de la quinine se trouvait alors à Amsterdam où les
prix étaient fixés par le « Kina Bureau ».
En Afrique la culture des quinquinas a réussi en Guinée (Sérédou 1935), Côte d’Ivoire (Man-Tonkoiri),
Cameroun et Madagascar.
La culture des quinquinas est difficile et nécessite des conditions strictes particulières :

- altitude (1000-3000m) : facteur très important pour la production d’alcaloïdes.


- le climat : température assez élevée et stable (15-25°C), une humidité importante (74-90%). Les
jeunes plants doivent se développer à l’abri du soleil.
- le sol doit être profond, perméable, argilo-silicieux, riche en humus.

La multiplication se fait par les graines, parfois par boutures. Les greffes sont également utilisées.

Espèces cultivées
C. succirubra est l’espèce la moins exigeante et la plus vigoureuse ; elle est surtout utilisée comme porte-greffe
car ses écorces sont relativement peu riches en alcaloïdes.

C. ledgeriana est l’espèce la plus cultivée en raison de sa richesse en alcaloïdes totaux et en quinine; elle a été
améliorée par une sélection.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 17-185


On cultive également des hybrides tels que C. hybrida et C. robusta. La récolte se fait par arrachage des arbres
de 6-9 ans d’âge (la teneur en alcaloïdes est maximale à cet âge), on récupère en même temps l’écorce des racines.
Les pays producteurs sont : Pérou, Bolivie, Equateur, Guatemala, Tanzanie, Indonésie, Inde.

Caractères de la drogue
La drogue est constituée par les écorces du tronc, des branches ou des racines. Les écorces de tronc se
présentent en morceaux plats ou légèrement cintrés, celles des branches en tuyaux ; les écorces de racines sont en petits
fragments plats, de faible épaisseur.

Quinquina rouge
Les écorces desséchées sont inscrites à la pharmacopée française IXème édition. Leur surface externe est
brun-rouge ou gris-brunâtre, fissurée longitudinalement et plus ou moins crevassée transversalement. La surface
interne est jaune ou brun rougeâtre ; l’odeur est faiblement aromatique, la saveur amère et astringente. La poudre est
brun-rouge.

- La coupe transversale d’écorce de quinquina rouge met en évidence :


- un suber très développé
- un phelloderme réduit
- un parenchyme cortical avec peu d’amidon, des cellules sécrétrices, des cellules à sable
d’oxalate de Calcium
- un liber formé de cônes libériens étroits et renfermant des fibres sclérifiées isolées.
- dans la poudre, l’élément caractéristique est constitué par la présence de fibres libériennes
isolées, longues, fusiformes, à parois épaisses et un lumen étroit avec canalicules.

Autres quinquinas
- Quinquina jaune : l’écorce, généralement privée de suber, est jaune fauve, la cassure très fibreuse,
l’odeur peu aromatique ; la saveur est très amère.
- Quinquina gris : l’écorce est très mince et très enroulée. La surface externe est gris-brun, l’odeur est
agréable, la saveur astringente et peu amère. La poudre est de couleur chamois.
- Cinchona ledgeriana : les caractères sont voisins de ceux du quinquina jaune.

2.CHIMIE DES QUINQUINAS

En dehors de l’eau, de l’amidon et des matières minérales, les écorces de quinquina renferment
- Tanins catéchiques (3-5%), ceux-ci s’oxydent facilement en phlobaphènes ou rouge de quinquina.
- une huile essentielle en faible quantité
- des acides organiques dont l’acide quinique
- un hétéroside triterpénique (le quinovoside).

Les principes actifs sont des alcaloïdes dérivés de la quinoleine, dont la teneur varie suivant les espèces entre
2 et 15% .
Ces alcaloïdes sont rattachés à un squelette fondamental comportant un noyau quinoleine et un noyau bi-
cyclique très spécifique : le noyau quinuclidique. Ces deux noyaux sont reliés par un carbone portant une fonction
alcool secondaire. Les alcaloïdes majeurs existent par paires de stéréo-isomères : quinine-quinidine, cinchonine-
cinchonidine.
La différence dans chaque couple d’alcaloïdes est due à la stéréochimie des carbones asymétriques 8 et 9.
A côté de ces alcaloïdes majeurs, on note la présence d’alcaloïdes minoritaires :
- homologues hydrogénés en 10-11 des précédents (hydroquinine, hydroquinidine, etc…).
- des dérivés cétoniques du type quinidine (ou quinotoxine)
- la cinchonamine possèdent un noyau indolique et un noyau quinuclidique à chaîne vinylée.

Propriétés des alcaloïdes des qunquinas


Ces alcaloïdes possèdent 2 azotes basiques (cependant restent des bases faibles) ; il en résulte qu’ils peuvent
fournir avec les acides 2 séries de sels :
- des sels basiques (un seul azote est alors salifié) qui sont peu solubles dans l’eau, ont une réaction
neutre en solution aqueuse.
- des sels neutres (2 azotes salifiés), solubles dans l’eau où ils donnent une réaction acide.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 18-185


Les autres propriétés seront vues dans les essais.

Teneur des différentes espèces en alcaloïdes


C. succirubra renferme 3 à 8% d’alcaloïdes totaux (A.T.) avec une teneur en quinine inférieure à 50% des A.T.
. C. calissaya renferme 3 à 7% d’alcaloïdes avec plus de 50% de quinine.
C. ledgeriana est le plus riche avec 15% d’A.T. et 80 à 90% de quinine.

3. BIOGENESE DES ALCALOÏDES

La biogenèse des alcaloïdes des quinquinas a pour point de départ le tryptophane, comme le laisse présager la
présence d’alcaloïdes comme la cinchonamine. Le tryptophane, décarboxylé en tryptamine se combine au
sécologanoside (un hétéroside monoterpénique) pour donner la strictosidine, le cinchonaminal puis la cinchonidinone
et la quininone précurseurs des principaux alcaloïdes.

4. EXTRACTION DES ALCALOÏDES

La poudre d’écorces est alcalinisée le plus souvent par un mélange de Ca(OH2) et NaOH, puis épuisées par un
solvant organique (toluène ou hydrocarbures pétroliers divers). La solution organique d’alcaloïdes est agitée ensuite
avec une solution de H2SO4. Par concentration et refroidissement de la solution aqueuse acide, le sulfate neutre de
quinine précipite et le sulfate de quinidine reste en solution.
La quinine est purifiée par des séries de cristallisations en jouant sur les différences de solubilité des sels
neutres et des sels basiques.
La quinidine est isolée des eaux mères sous forme de tartrate puis purifiée sous forme de sulfate.

5. ACTION PHYSIOLOGIQUE

La drogue totale, à faible dose possède des propriétés astringentes, toniques, amères (dues aux tanins). A forte
dose, on observe une action antimalarique et antipyrétique.

Action des alcaloïdes

- La quinine est un toxique cellulaire agissant en particulier sur les protozoaires et spécialement sur
les plasmodiums agents du paludisme. Elle agit surtout sur les formes érythrocytaires asexuées (=schizonticide), mais
ne diminue pas la fréquence des rechutes car faiblement gamétocide et inactive sur les sporozoides ainsi que les formes
tissulaires de l’hématozoaire.
A dose élevée, la quinine provoque des troubles sensoriels (bourdonnements d’oreille, vertiges, diplopie) et
est ocytocique (risque d’avortement).
- La quinidine est un antiarythmique cardiaque. Elle diminue l’excitabilité du cœur en diminuant sa
perméabilité à l’ion potassium.

Esssais des quinquinas


Les essais botaniques ont beaucoup perdu de leur importance à cause de l’approvisionnement quasi exclusive
du marché par les plantations.
Les essais physico-chimiques sont fondamentaux, car la drogue est vendue sur son titre en alcaloïdes.
Outre les réactions de précipitations classiques, on peut mettre en évidence et doser semi quantitativement les
alcaloïdes par C.C.M. de silice à partir d’un extrait chloroformique de la poudre d’écorces alcalinisée ; on utilisera un
témoin de quinine.
La quinine peut être caractérisée par la réaction de la thalléoquinine : l’extrait aqueux sulfurique a une
fluorescence bleue en UV, celle-ci disparaît lorsqu’on ajoute HCl.
Le dosage des alcaloïdes est fait sur le résidu d’alcaloïdes bases totaux, par protométrie utilisant l’acide
perchlorique, en milieu non aqueux (anhydride acétique).

E. Bassène Pharmacognosie 2009 19-185


DROGUE PULVERISEE

NaOH Ca (OH)2 /H2O


benzène

Marc Solution organique


H2SO4

Solution aqueuse Solution organique


(Sulfates neutres)
Na CO3 à chaud
concentration puis
refroidissement

Eaux mères Précipité


(Sulfate basique de quinine)
Tartrate
alcalin

Précipité Solution
(Tartrate quinine et
cinchonidine) (Tartrate quinidine et cinchonine

NaOH KI
éther

Solution Précipité
Solution Précipité
quinine cinchonine quinidine
cinchonidine
NH4OH
Précipité
cinchonine

EXTRACTION DES ALCALOÏDES DES QUINQUINAS

E. Bassène Pharmacognosie 2009 20-185


7. EMPLOIS DES QUINQUINAS

Les préparations galéniques à base de quinquinas (le rouge seulement) sont d’un emploi très limité comme
tonique, sous forme de teintures, d'extraits et de vins.
Les quinquinas sont utilisés de nos jours pour l’extraction des alcaloïdes.
L’extrait d’alcaloïdes totaux purifiés est utilisé sous forme de bichlorhydrate en injection pour combattre
l’accès palustre.

Spécialités : QUINIMAX, PALUJET.

La quinine est utilisée sous forme de sulfate basique, de chlorhydrate basique et d’ethylcarbonate, dans le
traitement de l’accès palustre et cela rarement (injection douloureuse).
Cependant elle reste indiquée dans les cas, hélas de plus en plus fréquents, de résistance aux amino-4-
quinoléines (chloroquine, amodiaquine).
La quasi totalité de la quinine produite dans le monde sert à la préparation de la quinidine, de la quinicine et
d’autres dérivés (1).
La quinidine sous forme de sulfate de phénhylbarbiturate ou d’arabogalactane sulfate est indiquée dans les
arythmies pour le maintien du rythme sinusal et la prévention des crises de tachycardie.
Spécialités : LONGACOR, NATISEDINE.

(1) : Actual. Chim. Thér. 13è série.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 21-185


LE PAVOT

PAPAVER SOMNIFERUM, PAPAVERACEAE

Le pavot somnifère est l’une des drogues dont les propriétés sont connues depuis la plus haute antiquité ; il est
mentionné dans une tablette sumérienne de Mésopotamie (4000 avant J.C.).
Au premier siècle de notre ère, DIOSCORIDE distinguait déjà le suc (opos en grec d'où vient le nom opium)
de l’extrait. Au 17ème siècle le laudanum de SYNENHAM fut mis au point par Thomas SYDENHAM; sont utilisation
fut très large au 18è et au 19è siècle. Les vertus du pavot étaient également connues en Inde et en Chine. Son utilisation
en toxicomanie apparut dès le 19è siècle en Europe et en Extrême Orient occasionnant une consommation accrue.
La morphine, principal alcaloïde du pavot somnifère, fut découverte en 1806 par SEGUIN et DEROSNE.
C’est un antalgique très puissant et très dangereux à cause de la toxicomanie qu’il entraîne et qui limite aujourd’hui
son usage en thérapeutique.
De même son dérivé acétylé (Héroïne = diacetyl morphine) est proscrit. Par contre de nombreux dérivés sont
utilisés comme antitussifs par exemple.

1. ETUDE BOTANIQUE

Description
Le pavot est une plante herbacée annuelle, à tige dressée (mesurant 0,50 à 1,5m). Les feuilles sont alternes, vert-
glauque ; les feuilles de la partie inférieure sont découpées profondément, tandis que celles supérieures sont
simplement dentées.
La fleur est solitaire, terminale et blanche, rose ou violette selon la variété. Le fruit est une capsule ovoïde ou sphérique
renfermant 25 à 30 000 graines très petites. Il existe de très nombreuses variétés et races dont trois principales :

La variété album ou pavot blanc à fleurs blanches et capsules ovoïdes indéhiscentes (pavot aveugle), graines blanches.
Elle est cultivée en Inde.
La variété glabrum, cultivée en Turquie. Elle a des fleurs pourpres, des capsules globuleuses avec des graines blanches
et noires.
La variété nigrum possède des fleurs violacées, des capsules aplaties déhiscentes par des pores (pavot à œillettes). Les
graines sont grises ou noirâtres. C’est l’espèce cultivée en Europe pour l’extraction de l’huile d’œillette.
Les drogues

Le pavot est cultivé d’une part pour le suc obtenu par incision des capsules encore vertes (préparation de
l’opium), et d’autre part pour la production de la paille de pavot (capsule + le 1/3 supérieur des tiges). Ainsi on
distingue la culture en climat tempéré et la culture en climat chaud.
- Culture en climat chaud :
Elle est traditionnellement réservée à la production de l’opium qui est défini comme le latex épaissi provenant
de l’incision des capsules encore vertes de plusieurs variétés de pavots (les principales étant album et glabrum).
Les semis des graines se font en automne ; les races à mésocarpe épais sont recherchées, car les incisions y
sont plus facilement pratiquées lors de la récolte du suc.
Les pays autorisés à produire de l’opium, depuis le protocole de New York de 1953, sont au nombre de 7 :
Iran, Inde, Turquie, Grèce, Bulgarie, Yougoslavie et l’ex URSS. Aujourd’hui la production licite ne se fait qu’en Inde
(446 tonnes en 1984), les autres pays ayant abandonné la culture ou alors ayant décidé de ne produire que la « paille »
(Turquie) pour limiter les trafics illicites.
Les cultures illicites sont très répandues notamment en Asie du Sud-Est (Laos, Birmanie, Thaïlande), au
Pakistan au Mexique.

- La culture en climat tempéré est réservée à la production de la « paille » de pavot. Jadis ces cultures
servaient à la production de graines destinées à l’extraction de l’huile. La mise au point d’une méthode rentable
d’extraction des alcaloïdes à partir de races sélectionnées d’une part et d’autre part par la volonté de réduire le trafic
illicite (l’extraction nécessitant des installations onéreuses), ont fait se développer la culture pour la production de
« paille », dans de nombreux pays.

2. CHIMIE DES PAVOTS

E. Bassène Pharmacognosie 2009 22-185


L’opium
L’opium renferme des substances banales telles que : minéraux, glucides, acides organiques (lactique et
méconique).
Les principes actifs sont des alcaloïdes isoquinoléiques (10 à 20%de l'opium), Ces alcaloïdes (plus de 20
isolés), sont sous forme de lactates, de méconates et de sulfates solubles dans l’eau.
Selon le squelette de base, on distingue 4 groupes d’alcaloïdes :

- le groupe du Morphinane où domine la morphine (5 à 20% de l’opium)


La morphine est une base peu soluble dans l’éther, insoluble dans l’eau ; ses sels sont solubles dans l’eau. A
cause de sa fonction phénol, elle donne des phénates alcalins solubles dans l’eau. La morphine réduit le nitrate d’argent
ammoniacal et donne une réaction colorée avec FeCl3.
Les autres alcaloïdes du groupe sont la codéine (methylmorphine) et la thébaïne (dérivé de l’énol-codéinone).
La codéine est plus soluble que la morphine, cependant elle est insoluble dans l’eau en milieu alcalin (ne donne
pas de phénates).

- le groupe des bensylisoquinoléines : ce sont plus précisément des dérivés du benzyl-


tétrahydroisoquinoléine. Le plus important par sa teneur est la papavérine (0,5 à 1,5% de l’opium).

- le goupe des phtalyl-tétrahydroisoquinoleines : l’alcaloïde majoritaire de ce groupe est la noscapine


ou narcotine (2 à 8%) ; la noscapine est une base très faible donnant des sels peu solubles dans l’eau froide ; son cycle
lactonique s’ouvre facilement en milieu alcalin.

- Groupe de la protopine : ces alcaloïdes ont leur noyau isoquinoléique ouvert.

Chimie des autres parties du pavot

- La paille de pavot est constituée par la partie supérieure de la plante (tige + feuilles
+ fruit).
Il existe deux procédés d’obtention de cette paille : la première consiste à récolter à maturité complète, lorsque
les feuilles sont desséchées et les graines riches en huile ; la paille est alors

broyée et stockée sous forme de granulés. Le second procédé consiste à récolter « en vert » environ 3 semaines après
la floraison ; il faut alors sécher rapidement. Ce dernier procédé permet d’obtenir une plus grande quantité d’alcaloïdes
(-0,3%).
On commercialise également un concentré de paille titrant environ 5% de morphine.

- La graine de pavot ne renferme pas d’alcaloïdes. On y trouve des glucides, des protéines et surtout
des lipides (40 à 50%).

- Les feuilles renferment des traces d’alcaloïdes.

3. EXTRACTION DES ALCALOÏDES DU PAVOT

Extraction des alcaloïdes de l’opium


La majeure partie de l’opium produite est actuellement destinée à l’extraction des alcaloïdes (840 tonnes, soit
77 tonnes de morphine). La méthode classique d'extraction est celle de ROBERTSON-GREGORY : elle consiste à
macérer l’opium dans l’eau, tous les alcaloïdes sont solubilisés sauf la noscapine qui reste dans le marc. Par addition
de chlorure de calcium, les acides organiques précipitent sous forme de sels de calcium ; les alcaloïdes, après
concentration des eaux-mères, précipitent sous forme de chlorhydrates pour donner le sel de Grégory (mélange de
chlorhydrates de morphine et de codéine).

Extraction de la paille de pavot


Etant donné la teneur très faible en alcaloïdes, l’extraction demande des procédés spéciaux ayant un maximum
de rentabilité. La méthode du KABAY répond à ce critère. Elle consiste à tremper la paille dans une solution aqueuse

E. Bassène Pharmacognosie 2009 23-185


légèrement alcaline ; celle-ci est épuisée par un alcool non miscible à l’eau, l’addition ultérieure d’ammoniaque
précipite la morphine.
D’autres méthodes font intervenir des fixations/élutions sur résines échangeuses d’ions.

4. ACTION PHARMACOLOGIQUE

L’action de l’opium résulte des actions cumulées des différents alcaloïdes. On note des cas d’antagonisme et
des cas de potentialisation.

Action de la morphine
Dans l’opium, cette action prime sur celle des autres alcaloïdes. On note une sensibilité variable suivant
l’espèce animale et l’âge (enfants et vieillards sont plus sensibles).

Sur le SNC la morphine a une action à la fois excitante (faible dose) et sédative (forte dose). Elle entraîne une
dépression respiratoire. Elle procure une sensation d’euphorie et de bien- être, avec accoutumance et assuétude. Ceci
fait que la morphine est classée parmi les stupéfiants.

Sur le tube digestif : la morphine provoque des spasmes stomacaux avec vomissements. Les sécrétions sont
diminuées et le péristaltisme intestinal également, entraînant une constipation; d'où l'action antidiarrhéique des
Opiacées.
La pharmacocinétique de la morphine est extrêmement importante, car a permis de découvrir les peptides
analgésiques (enképhalines et endorphines).
En effet on a montré qu’il existe dans le SNC des mammifères, des récepteurs naturels de la morphine et qui
sont originellement des sites d’action de peptides synthétisés dans l’organisme ; ces peptides ont une action semblable
à celle de la morphine. Cette découverte a permis de comprendre sous certains aspects l’acupuncture.

La codéine est un excellent antitussif, elle sert de référence. Son action sédative est peu marquée. Cependant,
à doses fortes et des prises prolongées, on peut observer une dépendance analogue à celle de la morphine.

La papavérine est un spasmolytique, stimulant cardiorespiratoire, obtenu surtout par synthèse chimique.

La noscapine est un antitussif à action centrale, bronchodilatateur.

5. ESSAIS DE L’OPIUM
Les essais sont essentiellement physico-chimiques.

Essais d’identification

- L’identification de l’opium peut se faire en mettant en évidence certains composés comme l’acide
méconique. Celui-ci est extrait à l’éther à partir d’un extrait aqueux acidifié d’opium ; en présence de FeCl3 on obtient
un coloration rouge.
- Les alcaloïdes sont caractérisés par C.C.M. de la teinture dans l’alcool à 60° et en présence de témoins
(morphine, noscapine…)
- Une autre réaction colorée peut être envisagée avec le réactif sulfo-fomolé qui donne avec le résidu
d’alcaloïdes totaux une coloration caractéristique de la morphine.

Dosage de la morphine
Le dosage est basé sur la solubilité particulière de la morphine. Elle est dosée par acidimétrie après élimination
des autres alcaloïdes. L’opium est d’abord traité par Ca(OH)2 (chaux) : l’acide méconique précipite, le morphinate de
calcium reste en solution. Par addition de chlorure d’ammonium, on a formation de CaCl 2 et d’ammoniaque qui
provoque la précipitation de la morphine base. La morphine est alors recueillie, lavée à l’eau saturée de morphine et à
l’éther, puis séchée.
Le précipité est ensuite redissous dans du méthanol bouillant et, après dilution, on titre avec HCl 0,1N en
présence de rouge de méthyle.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 24-185


6. EMPLOIS DU PAVOT

L’opium et le pavot sont surtout utilisés pour l’extraction des alcaloïdes. Cependant, l’opium est encore utilisé
sous forme galénique.

Formes galéniques de l’opium


On prépare un extrait d’opium titrant 20% de morphine, qui sert à préparer une teinture titrant 1% de morphine,
à partir de laquelle les autres formes sont préparées : Sirop d’opium fort (0,05%), sirop d’opium faible (0,01%), teinture
benzoïque (0,05% appelée Elixir Parégorique).
La poudre d’opium sert à préparer la teinture d’opium safranée (ou laudanum de Sydenham), titrant 1% de
morphine.

Extraction des alcaloïdes


Comme vu plus haut, la majeure partie de l’opium et du pavot est destinée à l’extraction de la morphine qui
va surtout servir à préparer des dérivés antitussifs, analgésiques ou antagonistes morphiniques.
La morphine est employée sous forme de chlorhydrate ou de sulfate par voie cutanée à la dose de 1 à 3 cg/24H.
Elle est contre-indiquée chez les enfants et chez les vieillards.
La codéine (Tableau B) est le principal alcaloïde utilisé (sulfate, camphosulfonate, iodhydrate…) comme
antitussif et antidiarrhéique. 80% de la morphine produite sert à préparer la codéine par méthylation. Les spécialités à
base de codéine sont très nombreuses (NEOCODION, BEXOL…).
La noscapine (Tableau A) est utilisé sous forme de base ou de chlorhydrate comme antitussif.
La thébaine est transformée en codéine ou en oxycodone (ou dihydrone), un analgésique et antitussif.

Dérivés morphiniques : Codéthyline (éthylmorphine) antitussif plus toxique que la codéine, Pholcodine
(morpholino-ethylmorphine), antitussif plus actif et moins toxique, Oxycodone (OH-14-codeinone), analgésique;
Apomorphine (émétique), Nalorphine (N-allyl nor-morphine), antagoniste morphinique partiel. Nalorphine (N-allyl
nor-morphine), antagoniste partiel, Nalaxone (N-allyl OH-14 dihydroxy 7,8 norcodeinone), antagoniste pur.

7. AUTRES PAVOTS

Diverses variétés de Papaver bracteatum présentent la particularité de n'élaborer que de la thébaïne (pas de
morphine). Ces espèces sont originaires d’Iran et d’Anatolie orientale ; leur généralisation pourrait limiter les
détournements vers les usages illégaux.

LES IPECAS : CEPHAELIS IPECACUANHA et CEPHAELIS ACUMINATA ( RUBIACEAE)

La racine et le rhizome de ces deux Rubiacées figurent à la pharmacopée africaine.

1. ETUDE BOTANIQUE

Les ipécas sont des sous-arbrisseaux de 20-40cm de haut, originaires des régions
tropicales humides d’Amérique du Sud ; C. ipecacuanha est originaire du Brésil, C. acuminata de Colombie et du
Nicaragua.

La drogue est constituée par les racines. Les racines de C. ipecacuanha (ou ipéca du Brésil) se présentent en
fragments tortueux de 10 cm x 2 à 4mm ; leur surface, gris noirâtre présente une succession de renflements circulaires
(d’où le nom d’ipéca annelé mineur) séparés par d’étroits étranglements. Les rhizomes sont des fragments courts
adhérents aux racines.
Les racines de C. acuminata (ou ipéca du Nicaragua, de Panama, de Carthagène) ont un diamètre plus grand,
mais de forme voisine de l’ipéca du Brésil.

2. COMPOSITION CHIMIQUE

On trouve des principes banaux tels que tanins catéchiques, un hétéroside azoté

E. Bassène Pharmacognosie 2009 25-185


(l'ipécoside).
Les principes actifs sont des alcaloïdes bisisoquinoléiques (2-3%) dont le plus important est l’émétine (60%
des alcaloïdes totaux.) suivi de la céphéline (25%). Ce sont des alcaloïdes isoquinoléino-monoterpéniques.

3. BIOGENESE DES ALCALOÏDES

La biosynthèse des alcaloïdes des ipéca est assez différente de celle de la plupart des isoquinoléiques et se
rapproche plutôt de la biogenèse des indolo-monoterpéniques. En effet, ces alcaloïdes résultent de la condensation
initiale d’une molécule de dopamine et d’une molécule de sécologanoside. Le désacétyl-ipécoside obtenu (épimère)
conduit à l’émétine.

4. ACTION PHYSIOLOGIQUE

La drogue totale doit ses propriétés à l’émétine qui est un toxique et irritant cellulaire.
Son action s’exerce sur les cellules de certains protozoaires et notamment sur Entamoeba histolitica (l'amibe
dysentérique).
Son action toxique chez l’homme se manifeste par des vomissements, une cardiotoxicité et une hypertension.
Au niveau des bronches on note une action expectrorante.
La céphaeline a une action émétique plus marquée.

5. EMPLOIS DES IPECAS

Les ipeca Ils servent à la préparation de formes galéniques et à l’extraction de l’émétine et de la céphaline.

Formes galéniques : Poudre titrée à 2% en A.T. ; extrait, teinture et sirop sont utilisés comme expectorant et le
sirop comme vomitif.
L’ipéca entre dans la composition du sirop de Desessartz (antitussif) ou sirop officinal d’ipecacuanha composé,
en association avec le séné, coquelicot, serpolet et le sulfate de magnésium.

Extraction de l’émétine
La céphéline est transformée en émétine par méthylation. Le chlorhydrate d’émétine est encore l’un des
produits les plus actifs contre l’amibiase hépatique (abcès amibien du foie) et reste utilisée malgré sa toxicité. Dans la
thérapeutique courante, on lui préfère son dérivé, la déhydro-2,3 émétine produite par hémi-synthèse. Celle-ci est
utilisée par voie orale et par voie parentérale (IM et SC) dans l’amibiase intestinale et dans l’abcès amibien du foie,
les distomatoses hépatobiliaires et certaines schistosomiases.

LE COLCHIQUE

Colchicum autumnale (Liliaceae)

Le colchique est une plante connue depuis l’antiquité grecque et arabe pour sa toxicité et son action
antigouteuse. Aujourd’hui les graines sont utilisées pour l’extraction de la colchicine.

1. ETUDE BOTANIQUE

Le colchique est une plante herbacée poussant dans les prés d’Europe, vivace par son bulbe. Le fruit est une
capsule septicide à 3 loges, contenant 60 à 80 petites graines par loge.
La plante est cultivée en Italie, France, Europe Centrale et Orientale.

La drogue : les graines de colchique sont petites (diamètre ne dépassant pas 3mm), trèd dure et brun rougeâtre.
Le tégument se développe anormalement sur un côté de la graine en formant un caroncule qui renferme de l’amidon.
Pour les besoins de l’extraction, on peut également utiliser le bulbe qui est récolté en juillet-août avant l’apparition de
la hampe florale ou après la chute des feuilles.

2. COMPOSITION CHIMIQUE

E. Bassène Pharmacognosie 2009 26-185


La teneur en alcaloïdes totaux varie de 0,6 à 1,2% pour les graines et de 0,3 à 0,6% pour les bulbes. Les
alcaloïdes sont des amides non basiques dérivés du tropolone ; ils sont solubles dans l’eau et le chloroforme; ne
forment pas de sels définis, mais précipitent avec les réactifs généraux des alcaloïdes.
Le principal alcaloïde est la colchicine ; elle est accompagné de plusieurs autres substances tropoloniques
(colchicoside …).

3. BIOGENESE
On a fait dériver les tropolones de la phénéthyl-isoquinoléine, mais en réalité cette voie biogénétique n’est pas
évidente ; cependant on peut dire que la phénylalanine (par l’acide cinnamique) et la tyrosine (par la dopamine) sont
incorporées.

4. ACTION PHYSIOLOGIQUE DE LA COLCHICINE

La colchicine est un irritant émétocathartique chez l’homme et les carnivores, toxique à forte dose. Son action
antigouteuse se manifeste par une activité anti-inflammatoire, sans action sur la synthèse de l’acide urique (conférer
flavonoïdes). Elle s’élimine lentement, pouvant ainsi provoquer des accidents digestifs.
La colchicine a une action antimitotique, bloquant la division cellulaire en métaphase et occasionnant ainsi la
formation de polyploïdes (utilisation agricole).

5. ESSAIS

La colchicine est caractérisée par C.C.M. de la teinture au 1/5, la révélation se fait par pulvérisation d’un
mélange d’anhydride acétique et de H2SO4 (coloration jaune).
Le dosage est pondéral (Pharmacopée française 1972).

6. EMPLOIS

La colchicine est un antigoutteux encore très utilisé en association avec l’aspirine et la vitamine B1. Elle est
également utilisée dans les sclérodermies et les cirrhoses comme inhibiteur de la biosynthèse du collagène.

La N-désacetylthiocolchicine, un dérivé de la colchicine, est un anticancéreux (THIOCOLCIRAN).

Le thiocolchicoside, un dérivé soufré du colchicoside, est un décontracturant musculaire (COLTRAMYL).


En dehors des emplois médicaux, la colchicine est utilisée en horticulture pour l’obtention des polyploïdes
(voir cours sur la multiplication des plantes médicinales).

N.B. Certaines espèces du genre Gloriosa (les graines de G. superba, Liliaceae) sont recherchées comme source
industrielle de colchicine.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 27-185


PLANTES A BASES PURIQUES : GENERALITES SUR LES BASES PURIQUES

En fait, le terme d’alcaloïde ne convient pas aux bases puriques, si l’on se réfère à la définition des alcaloïdes
(voir généralités).
En effet ces bases ne donnent pas de précipités avec les réactifs généraux des alcaloïdes ; ils sont solubles dans
l’eau chaude et dans les solvants chlorés.

1. STRUCTURE
Les bases puriques sont des composés à noyau purine, plus précisément xanthine (d’où
le nom de bases xanthiques). Leur structure bicyclique renferme un noyau pyrimidine annelé à un noyau imidazole.

2. PROPRIETES PHYSICO-CHIMIQUES
Les alcaloïdes puriques sont des bases très faibles directement extractibles par un solvant organique apolaire,
sans déplacement préalable de leurs sels. A chaud, les sels sont dissociés dans les solvants organiques.
Théophylline et théobromine sont les moins basiques car comportent un hydrogène plus ou moins mobile (-N-
H) conférant à la molécule une certaine acidité.
La mise en évidence de ces composés se fait par une réaction colorée dite « de la murexide», mise en œuvre
sur un extrait chloroformique en milieu alcalin sur lequel on fait agir de l’eau de brome ou de l’acide nitrique, puis
après addition d’ammoniaque, on obtient une coloration violacée.

3. ESSAIS

Qualitatifs : caractérisation des bases par C.C.M. en présence de témoins.

Dosage des alcaloïdes : Ce dosage pondéral comporte les étapes suivantes :


- Insolubilisation des tanins par trituration avec l’oxyde de magnésium.
- Extraction par le chloroforme à chaud.
- Le résidu de l’extrait chloroformique est repris par l’éther de pétrole, puis on extrait par HCl dilué.
- La phase aqueuse est extraite au chloroforme après alcalinisation à l’ammoniaque.
- La phase chloroformique donne un résidu qui est pesé.

4. ACTION PHYSIOLOGIQUE

Les bases puriques possèdent en commun plusieurs propriétés pharmacologiques mais l’intensité des actions
varie avec la nature chimique des différentes bases.

Action sur le SNC


A ce niveau la caféine est la plus active. Elle excite toutes les parties du SNC. Les bases puriques diminuent
la sensation de fatigue, augmentent le travail intellectuel, diminue la somnolence. A fortes doses, elles déclenchent des
convulsions cloniques. On note par ailleurs une excitation des centres spinaux, augmentant ainsi l’excitabilité réflexe.
Au niveau des fibres motrices, les xanthines favorisent la libération d’acétylcholine. En outre, elles augmentent
l’amplitude du premier potentiel de plaque motrice. Cette action est analogue à celle d’un accroissement de l'ion
calcium.

Action sur les muscles


Les xanthines accroissent la force des contractions des muscles squelettiques ; cette action est directe et porte
uniquement sur l’amplitude des contractions, le temps nécessaire pour atteindre le maximum et la durée des
contractions restent inchangées.
Sur les fibres lisses on note un relâchement au niveau des bronches (surtout la théophylline), les vaisseaux,
l’intestin et l’uretère.
Action cardio-vasculaire
Les xanthines stimulent le cœur. Elles accroissent le rythme et la force des contractions cardiaques.
L’amplitude de la contraction est accrue ; l’action est semblable à celle des catécholamines bien que plus lente à
s’établir. Les effets cardiaques de ces catécholamines sont potentialisés.

Action sur le rein

E. Bassène Pharmacognosie 2009 28-185


Les xanthines ont une action diurétique. La caféine est la moins active. Elles provoquent une diurèse hydrique
et sodique en réduisant la réabsorption du sodium au niveau du tubule proximal.

Mécanisme d’action
Les xanthines agissent sur le métabolisme du calcium, inhibent la phospho-diesterase responsable de
l’hydrolyse du 3’5‘ AMP cyclique.
L’action sur le calcium est responsable des effets musculaires et cardiaques, tandis que l’action sur la
phosphodiesterase rend compte des effets pharmacologiques tels que : glycogénolyse et hyperglycémie, lipolyse,
augmentation de la sécrétion d’insuline et de rénine, mobilisation du calcium osseux.
Enfin les xanthines sont des antagonistes puissants des nucléotides comme l’ATP dans les jonctions où ils
jouent le rôle de neurotransmetteurs.

Remarque : L’action des alcaloïdes est modifiée par la présence de certains composés dans la drogue totale :
les tanins, par les combinaisons insolubles qu’ils donnent, confèrent un effet retardé et durable. Les flavonoïdes
renforcent l’action diurétique.

PLANTES A CAFEINE

1. LE CAFEIER

La drogue appelée café, et constituée par l’amande, provient de Coffea divers notamment de Coffea arabica et
C. canephora de la famille des Rubiaceae.

a) Etude botanique

Description
Les caféiers sont de petits arbres originaires d’Afrique ; leurs feuilles sont persistantes, courtement pétiolées,
à limbe ovale, vert luisant sur la face supérieure. Les fleurs blanches, verticillées sont très odorantes. Le fruit est une
drupe ovoïde verte puis rouge à maturité.
On distingue deux espèces cultivées :
- C. arabica, originaire des hauts plateaux d’Abyssinie (Ethiopie actuelle), possède des feuilles de 10
à 15cm de long sur 4 à 5cm de large, des fruits de 15 à 20mm de long.

- C. canephora, originaire de l’Ouest africain, est une espèce plus robuste qui se distingue du précédent
par des feuilles plus grandes, des inflorescences plus denses et des fruits plus petits.

Le fruit du caféier comprend un épicarpe rouge et un mésocarpe pulpeux renfermant des graines. Ces graines
sont constituées, de l’extérieur vers l’intérieur par : un endocarpe sclérifié ou « parche », un tégument plus fin (le
tégument séminal ou « tégument argentin ») et enfin une amande ou « fève » comprenant elle-même un albumen corné
et l’embryon.
Le fruit entier est appelé « café cerise » ; débarrassé de l’épicarpe et du mésocarpe, c’est le « café en parche » ;
réduit à l’amande, c’est le café marchand ou café « en grain ».

Culture et récolte
La culture, délicate, est réalisée à l’aide de variétés sélectionnées. Coffea arabica var typica et var « Mokka »
sont cultivées au Brésil, Colombie, Arabie et en Inde. Coffea canephora var. robusta est cultivée dans les régions
basses et humides de l’Ouest africain (Côte-d’Ivoire, Congo).
La récolte des fruits, essentiellement manuelle, se fait au moment de leur pleine maturité.

b) Traitement du café cerise


- par voie humide : on procède au dépulpage, le mucilage est éliminé par fermentation : après lavage
à l’eau, on obtient le café en parche que l’on sèche au soleil ou à l’air chaud. On termine en éliminant mécaniquement
l’endocarpe et le « tégument argentin ».
- par voie sèche : le traitement consiste à sécher à l’air chaud ou au soleil ensuite décortiquer mécaniquement
l’ensemble des enveloppes.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 29-185


A l’issue de ces deux procédés on obtient le café vert « en fève » ou « en grain » qui sont les cafés
commerciaux.
La préparation du café torréfié a pour but de développer l’arôme particulier du café. C’est une opération
délicate consistant en un « grillage » des grains vers 200°C, réalisé au moyen d’un courant d’air chaud et sous agitation.
Les grains refroidis sont ensuite triés et généralement enrobés pour leur donner un aspect lustré et en même temps
favoriser leur conservation ; celle-ci nécessite souvent un emballage sous vide.

c) Composition chimique du café


Selon que l’on est en présence de café vert ou de café torréfié, on aura une composition chimique légèrement
différente.

Le café vert
On y trouve 10 à 12% d’eau et 3 à 4% de matières minérales représentées par des phosphates et sulfates de
potassium, calcium et sodium.
Les glucides représentent plus de 50% de la matière sèche ; ce sont surtout des polysaccharides : cellulose et
dérivés, amidon, gommes, mucilages et pectines.
Les lipides formés par des stéroïdes et terpénoïdes, représentent 10 à 15% des constituants du café vert.
On retrouve des acides organiques aliphatiques (oxalique, citrique, malique, succinique…) et des acides
phénols surtout sous forme de combinaisons avec l’acide quinique ; ce sont notamment les acides chlorogéniques (ou
acides caféyl-quiniques).
Parmi les composés azotés on trouve :
- des protéines, des acides aminés libres et de la trigonelline.
- des bases puriques représentées surtout par la caféine dont la teneur varie selon les espèces : 0,6 à
2% pour C. arabica et 1 à 3% pour C. canephora. On trouve également des traces de théophylline et de théobromine.

Café torréfié
Au cours de la torréfaction, certaines modifications de la composition chimique on lieu :

- la teneur en eau est abaissée au voisinage de 5%


- les glucides sont partiellement hydrolysés.
- les acides chlorogéniques sont en partie détruits
- la trigonelline est transformée en amide nicotinique (vitamine PP).
- la caféine est partiellement libérée de ses combinaisons tanniques.
- l’arôme est développé : il s’agit d’un mélange très complexe de produits odorants.
- enfin il y aurait formation d’une caféotoxine, mais dont la présence est controversée.

d) Essais
- Vérifications de caractères organoleptiques : odeur, goût, couleur.
- Dosage de la caféine (voir généralités).
e) Action physiologique

En dehors de l’action physiologique de la caféine, il faut noter l’action particulière des acides chlorogéniques
doués de propriétés stimulantes, diurétiques, expectorantes.

f) Emploi du café
Le café est le premier produit agricole d’exportation des pays non développés (5,6 millions de tonnes en 1983).
Le café produit sert à fabriquer différents produits :
Le café soluble est un nébulisat ou un lyophilisat d’un extrait aqueux.
Le café décaféiné est obtenu en traitant le café vert à la vapeur d’eau puis au trichloroéthylène. On obtient des
taux de caféine voisins de 0,1%. D’autres procédés utilisent le CO2 supercritique après imbibition préalable du grain
de café par l’eau ; on récupère alors la caféine sur charbon actif. Cependant le café décaféiné reste toxique pour le SNC
par la caféotoxine.
Le café moulu : il est consommé après extraction.

Extraction de la caféine

E. Bassène Pharmacognosie 2009 30-185


Une partie de la caféine utilisée dans l’industrie pharmaceutique ou pour charger les boissons à base de cola,
provient de la préparation des cafés décaféinés. On en extrait également des suifs provenant de torréfaction.
La caféine est utilisée comme excitant cortical et analeptique cardiaque dans plusieurs spécialités par voie
orale ; par voie externe comme anti-adipeux dans les surcharges adipeuses sous-cutanées (PERCUTAFEINE GEL).

2. LE THEIER

Thea sinensis (ou Camelia thea), Ternstremiaceae

a) Etude botanique

Le théier est un arbuste originaire de l’Inde. Les feuilles sont persistantes,


régulières, ovales avec des bords dentés munis de griffes. Lorsqu’elles sont jeunes, les feuilles sont poilues et souples ;
âgées, elles sont glabres et coriaces. Les fleurs sont blanches ; le fruit est une capsule loculicide.
La drogue est constituée par les feuilles jeunes ayant subi diverses transformations destinées à développer
l’arôme ou à les stabiliser (voir préparations des thés commerciaux).

Culture du théier et récolte

La culture du théier exige un climat chaud (>20°C) et humide, une altitude comprise entre 1000 et 2000m.
L’arbuste est fréquemment taillé, ce qui favorise la ramification et la pousse de jeunes feuilles.
La récolte se fait plusieurs fois par an et commence chez les plantes de 3 ans jusqu’à 12 ans. Cette récolte est
exclusivement manuelle ; les bourgeons terminaux accompagnés de quelques feuilles (4 à 5) sont cueillis. Les
bourgeons foliaires non épanouis constituent le thé « Pékoé ».

b) Préparation des thés commerciaux

Les feuilles, une fois récoltées, vont subir des transformations pour donner deux types de thés : les thés verts
et les thés noirs.
Les thés verts sont obtenus par stabilisation des feuilles à la vapeur d’eau suivie d’une torréfaction, elles sont
ensuite roulées à la main ou à la machine. On y ajoute souvent des colorants (indigo, curcuma ou sulfate de vivre).
Les thés noirs sont des thés fermentés, ils ont un arôme particulier. On distingue les opérations suivantes :
- Flétrissage des feuilles par un courant d’air chaud (30-35°C) pendant 18 à 20 heures.
- Roulage permettant de briser les cellules pour en libérer le suc et permettre une bonne fermentation.

- La dessiccation est effectuée à 90°C pendant 30mn (jusqu'à 5% d’eau).


- Le criblage permet de séparer différentes qualités : "orange pékoé" (feuilles entières) "Fannings"
(feuilles brisées).

c) Composition chimique du thé

Le thé renferme 4 à 7% de sels minéraux (sels de potassium surtout), des acides organiques (succinique,
malique, chlorogénique, galloyl-quinique).
Les composés les plus importants sont :
- des bases puriques : 2 à 4% comprenant surtout de la caféine avec de petites quantités de théophylline.
Ces bases sont combinées dans la plante aux acides organiques et aux tanins.
- des flavonoïdes hétérosides du quercétol et du kaempférol.
- des tanins constitués par des catéchols et leurs esters galliques, ainsi que des tanins catéchiques
condensés.
- une huile essentielle à l’état de trace, se développant au cours de la fermentation.
- des vitamines (C et B) et des enzymes (oxydases ou théases).

d) Action physiologique

Le thé est un stimulant central et cardio-respiratoire, action due à la caféine et à la théophylline. C’est aussi un
diurétique (bases puriques et flavonoïdes) ; le thé a également une propriété vitaminique P (catéchols et flavonoïdes).
Le thé peut provoquer une intoxication chronique (le théisme) qui se manifeste par des insomnies, une
excitation, une dyspepsie et un amaigrissement.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 31-185


e) Emplois du thé
Le thé sert à préparer des boissons stimulantes de très grande consommation.

3. LES KOLATIERS

Cola nitida, C. acuminata et C. verticillata, Sterculiaceae

Description
Les kolatiers sont des arbres d’Afrique tropicale, à feuilles isolées ou verticillées. Le fruit est composé de 5
follicules verruqueuses, mesurant 5 à 10 cm de long et disposées grossièrement en étoile. Chaque follicule renferme 5
à 10 graines blanches ou rouges recouvertes d’un tégument blanchâtre.
La graine peut être composée de 2 fragments (C. nitida) ou de 4 à 6 fragments (C. acuminata et C. verticillata).
Pour C. nitida on distingue plusieurs variétés suivant la taille et l’aspect des graines : rubra, alba, mixta, pallida.
La drogue est constituée par les graines sans téguments (cotylédons).

b) Culture et formes commerciales

Le kolatier pousse et est cultivé en Afrique Occidentale, et au Congo, à basse altitude.


Les graines récoltées sont laissées en tas durant 3 jours, puis lavées. La noix de cola commerciale se présente
sous trois formes :

- Noix fraîches : elles sont enveloppées dans des feuilles, dans la tourbe ou alors dans du charbon de
bois humidifiés régulièrement. Leur conservation est précaire, mais reste la forme de vente la plus courante
- Noix stabilisées à la vapeur d’eau, elles sont de bonne conservation.
- Noix séchées : le séchage se fait avec précaution afin d’éviter un durcissement, une fermentation ou
une oxydation.

c) Composition chumique de la noix de cola

La noix de cola renferme 40% d’amidon et de sucres, 2 à 4% de tanins catéchiques qui s’oxydent facilement
pour donner des phlobaphènes (ou rouge de cola). Les bases puriques sont représentées principalement par la caféine
(2%) accompagnée de traces de théobromine.
Dans la noix fraîche, les alcaloïdes sont combinés aux tanins alors qu’ils sont libres dans la noix séchée.

d) Emplois

La noix fraîche est un masticatoire, tonique musculaire et nerveux. A partir de la noix séchée sont préparées
des formes galéniques : Extrait ferme (5% caféine), extrait fluide (1,5% caféine), extrait mou stabilisé (5% caféine),
vins et teintures (0,10% caféine). Ces formes galéniques entrent dans la fabrication de médicaments et de boissons
toniques, stimulantes.
Les extraits obtenus à partir de noix stabilisées ont l’avantage d’avoir une action douce (caféine liée aux tanins)
et de conserver une action vitaminique P due aux catéchines.

4. AUTRES PLANTES A CAFEINE

Le Guarana : Paullinia sorbilis, Sapindaceae


C’est une liane brésilienne dont les graines servent à préparer une pâte séchée appelée guarana. Le guarana
renferme 4% de caféine, 10% de tanins. Les fleurs et les feuilles renferment surtout de la théobromine.
Le guarana est employé à la préparation de boissons stimulantes très consommées au Brésil.

La Maté : Ilex paraguariensis, Ilicaceae


Le Maté est un petit arbre d’Amérique du Sud (Brésil, Paraguay, Argentine). Les feuilles séchées
renferment 1 à 2% de caféine et servent à la préparation de boissons stimulantes.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 32-185


LE CACAOYER : Theobroma cacao, Sterculiaceae

1. ETUDE BOTANIQUE

Description
Le cacaoyer est un petit arbre spontané dans le sous-bois des grandes forêts humides d’Amérique tropicale.
Son port est ramifié, ses feuilles alternes, simples et grandes ; ses fleurs sont très petites, blanches ou rosées naissant
directement sur le tronc et les grandes branches. Le fruit est une cabosse de 15 à 20 cm de long sur 10 à 12 cm de
large ; son enveloppe est coriace, jaune ou rouge à maturité et marquée de côtes longitudinales verruqueuses. Il
renferme de nombreuses graines (30 à 40) ou "fèves de cacao" enveloppées d’une pulpe blanche.
Les graines, ovoïdes, mesurent 2 à 3 cm de long sur 1 à 1,5 cm de large avec un tégument externe (« coque »)
mince, brun-rougeâtre.

Culture et récolte
Le cacaoyer est essentiellement cultivé en Amérique et en Afrique tropicale dans des conditions climatiques
particulières : température moyenne 25°C, humidité constante, etc..
Il existe plusieurs variétés dont les variétés "cryollo"et "forastero". On récolte les fruits des arbres âgés d’au moins 6
ans.
La préparation du cacao commercial nécessite plusieurs jours de fermentation suivie d’un séchage au cours
desquels l’arôme se développe.
Les pays producteurs sont : Côte d’Ivoire (premier producteur mondial), Ghana, Nigeria, Cameroun, Equateur,
Brésil.

2. COMPOSITION CHIMIQUE DE LA GRAINE SECHEE

L’amende de la graine contient environ 50% de triglycérides d’acides gras saturés en C16 et C18. Ces lipides
sont solides à la température ordinaire et constituent le beurre de cacao. On trouve également des tanins catéchiques
qui s’oxydent en rouge de cacao.
Les xanthines représentent 1 à 3% de la drogue, sont représentées surtout par la théobromine et peu de caféine.
On retrouve la théobromine dans la coque (1,5%) après la fermentation et la torréfaction.

3. EMPLOIS DES GRAINES DE CACAOYER

Extraction du beurre de cacao par expression à chaud. Il sert comme excipient pour suppositoires.
Les coques servent à l’extraction de la théobromine (par eau chaude).
La poudre de cacao sert comme correcteur de goût pour les médicaments destinés aux enfants (antibiotiques,
vitamines…). Elle sert également à la fabrication du chocolat. Au Sénégal, la poudre de cacao est additionnée de pâte
d'arachide et de sucre pour donner une pâte alimentaire à tartiner, très prisée.

E. Bassène Pharmacognosie 2009 33-185

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