• Deuxième tome du recueil historique présenté par les éditions Les échappés, cet ouvrage a été rédigé en parallèle au précédemment publié Vive les Soviets: un siècle d'affiches communistes, de Romain Ducoulombier. Car comme le précise son auteur, Nicolas Lebourg, l'anticommunisme fonctionne "souvent par rebonds ou rétorsions de la propagande communiste". Ainsi, tout comme son "ouvrage-frère", Mort aux bolchos retrace un siècle de bataille des représentations sur le front de l'affichage politique, mais cette fois du point de vue anticommuniste. Et c'est à nouveau dans les collections de Michel Dixmier et de Jean-Jacques Allevi que l'historien, spécialiste de l'extrême droite, a choisi une sélection de documents -"pour ce qu'ils nous disaient du siècle, souvent, pour leur beauté aussi, parfois". En voici un aperçu.

ANTICOMMUNISME

1928. Le mouvement anticommuniste assimile le bolchevisme et Moloch, ce dieu au nom duquel les Ammonites sacrifiaient leurs premiers-nés... Cette affiche, réalisée par Alo (Charles-Jean Hallo) 1928 pour le Centre de propagande des républicains nationaux, met en scène une guillotine, un instrument pourtant pas employé en Russie, note l'auteur, mais qui rappelle, dans l'Hexagone, la "Terreur révolutionnaire". Car pour les anticommunistes, précise-t-il, le bolchevisme "consume les hommes, y compris ses serviteurs fidèles, un jour purgés comme les autres".

ANTICOMMUNISME

FRONT POPULAIRE

1932. Affiche diffusée par le Centre de propagande des républicains nationaux (CPRN), une des deux principales organisations anticommunistes en France, fondée par Henri de Kerillis en 1926. Ce dernier avait déclaré à ses partisans en 1927: "Nous avons fait l'amère constatation qu'aucun parti ne se sentait le courage d'apposer sur les murs de Paris des affiches attaquant nettement le communisme."

FRONT POPULAIRE

Mort aux Bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes

1934. Comme en témoigne le nom du CPRN -Centre de propagande des républicains nationaux-, le mouvement anticommuniste se veut profondément républicain. Il voit ainsi le communisme "comme le premier ennemi de la République", note Nicolas Lebourg. Aussi le symbole de la République française, Marianne, apparaît-elle souvent dans les affiches anticommunistes comme menacée, bafouée... Comme dans ce dessin de Paul Iribe, Le témoin.

Mort aux Bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes

FRONT POPULAIRE

1936. Nicolas Lebourg rappelle l'accès au pouvoir du Frente Popular en 1936 suivi peu après de la guerre civile en Espagne. Pour cette affiche, réalisée cette même année pour le CPRN, il précise: "Pour mieux accabler la gauche française, le gouvernement espagnol est rendu responsable tant de la guerre civile que de l'exil."

FRONT POPULAIRE

ANTICOMMUNISME

1936. Les anticommunistes n'hésitent pas à rappeler que ce sont les bolcheviques qui avaient permis aux troupes allemandes de se redéployer sur l'Hexagone en 1918. Leurs affiches clament d'ailleurs que voter pour le Front Populaire risquerait de déclencher la guerre, comme cette illustration de Yo Mich pour le CPRN: "Le vert tendre de la carte de France sert à souligner que celle-ci serait paisible et douce à vivre sans la menace germano-communiste", note Nicolas Lebourg.

ANTICOMMUNISME

Mort aux bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes

1942. Affiche réalisée par Michel Jacquot pour le Comité d'action antibolchevique. Ce dernier est créé une fois la guerre germano-soviétique déclenchée, en 1941, et ne se veut pas uniquement contre le communisme mais s'élève aussi contre le capitalisme. Il défend plutôt l'idée d'un "socialisme national" -"autoritaire, populiste, nationaliste, répudiant le dogme de la lutte des classes et fustigeant l'égoïsme des nantis", comme le décrit Nicolas Lebourg- au nom duquel il justifiera la collaboration...

Mort aux bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes

Mort aux Bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes

1943. Certains anticommunistes collaborationnistes s'engagent ainsi, contre le bolchevisme, dans la Légion des volontaires français, qui sera vite ralliée aux forces allemandes. A propos de cette affiche, prônant l'engagement militaire, l'historien précise: "La moitié des 900000 Waffen SS de 1944 ne sont pas allemands. Sur le front, les Français pèsent peu: environ 2500 hommes pour la brigade Frankenreich et 8000 pour la division Charlemagne."

Mort aux Bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes

ANTICOMMUNISME

1951. "Parler à l'estomac, [c'est] l'un des arguments puissants des anticommunistes" remarque Nicolas Lebourg. C'est pourquoi ces derniers s'adressent souvent aux "petites gens", essayant de les convaincre que le communisme les mènerait à leur perte. Dans cette affiche, l'organisation Paix et Liberté s'adresse en particulier aux "Vieux et vieilles de France", ayant recours à de vieux dictons: "Un bon tiens vaut mieux que deux tu l'auras..."

ANTICOMMUNISME

ANTICOMMUNISME

1951. Le mouvement anticommuniste retient surtout le mot "dictature" dans le principe de "dictature du prolétariat", et ne cesse "d'évoquer une 'prison des peuples' trouvant aisément sa retranscription visuelle", comme dans cette affiche de Paix et Liberté.

ANTICOMMUNISME

ANTICOMMUNISME

1951. "Détournement et parodie d'une affiche du PCF de 1946 où la semelle portait des croix gammées et où le slogan était 'Pour ne plus revoir ça!'", note l'auteur quant à cette affiche réalisée pour Paix et Liberté, à l'heure du conflit diplomatique entre les Etats-Unis et l'URSS. Il précise que "le logotype communiste n'est pas celui du PCF mais de l'URSS [et que le document] n'évoque nullement explicitement un cas français qui pourrait porter l'affaire devant les tribunaux."

ANTICOMMUNISME

Parti communiste

1952. La trahison de l'URSS envers la France, en 1918 puis en 1940, lorsqu'elle a adressé ses "félicitations" au gouvernement nazi, est un sujet souvent repris par les anticommunistes. En témoigne cette affiche réalisée vers pour Paix et Liberté: "Le nazi à gauche de l'image est en fait Jacques Duclos", remarque l'historien, "à cette date numéro 2 du PCF qui, durant la guerre, a en charge de sa structure clandestine. IIIe Reich et URSS sont amalgamés grâce à la représentation de drapeaux intégralement rouges, dépourvus des logotypes idéologiques. Si le drapeau nazi était à fond rouge, c'était expressément dans le but de concurrencer le bolchevisme auprès du prolétariat."

Parti communiste

Mort aux Bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes

1955. Alors que les communistes s'y sont associés, via le symbole de la faucille, le mouvement anticommuniste tente également d'accaparer les paysans. Ainsi, face aux slogans du PCF -tel "la terre aux paysans"-, l'affiche anticommuniste dénonce, elle, "l'abolition de la propriété foncière individuelle, source de famines et d'esclavage" note l'historien. Comme dans cette affiche réalisée pour Paix et Liberté, seconde principale organisation de propagande anticommuniste.

Mort aux Bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes

ANTICOMMUNISME

1955. L'affichage anticommuniste veut dévoiler ce qui se cache réellement derrière "l'illusion communiste". Et reprend souvent, pour ce faire, des thèmes enfantins (on y trouve par exemple des représentations du Petit Chaperon Rouge ou encore d'un crocodile rappelant celui de Peter Pan). Car le mouvement se veut également défenseur de l'avenir des enfants de la République, comme le démontre cette affiche réalisée pour Paix et Liberté.

ANTICOMMUNISME

ANTICOMMUNISME

1971. La France prend ses distances avec la Guerre Froide dans les années 1960 et l'opinion publique est de moins en moins hostile envers l'URSS. Mais l'affiche anticommuniste continue de diaboliser "l'ogre soviétique". Celle-ci, réalisée par Ordre Nouveau contre la venue de Brejnev à Paris en 1971, puis reprise en 1977, "détourne les personnages des 'enzymes gloutons' inventés pour une campagne publicitaire d'une marque de lessive" note l'historien, lesquels "deviennent ici des casques dentés et anthropophages. Le slogan réalise une rétorsion des célèbres 'Ridgway la Peste', 'go home!' des communistes lors de la guerre de Corée."

ANTICOMMUNISME

Mort aux Bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes

1980. Nicolas Lebourg évoque une assimilation récurrente entre communisme et nazisme, comme dans cette affiche réalisée par la Fédération anarchiste: "Le jeu sur les dernières lettres du sigle URSS est un classique des affiches anticommunistes quel que soit idéologiquement leur émetteur, idem le fait de gammer la faucille et le marteau."

Mort aux Bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes

Mort aux Bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes

1992. L'affichage anticommuniste s'emploie souvent à assimiler un autre mal -tel le socialisme- au communisme. "La peur du rouge tapi derrière le rose", traduit Nicolas Lebourg, comme dans cet autocollant édité par le Rassemblement pour la République: "Le traitement en noir et blanc d'une photographie d'actualité permet de faire ressortir que le socialisme relèverait du passé, tandis que le parti dont le logotype est en couleur serait l'avenir. La position en bas à gauche suggère que ce symbole est la solution du problème posé. 'Le socialisme, une idée qui fait son chemin' était le slogan d'une campagne d'affichage pour François Mitterrand en 1976."

Mort aux Bolchos, un siècle d'affiches anticommunistes
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